Dans le contexte actuel d’urgence climatique, le patrimoine culturel est de plus en plus fragilisé par les évènements extrêmes. Sa vulnérabilité est accrue par sa fragilité intrinsèque (ancienneté de ses composantes tels que les matériaux par ex.) dans un environnement de crise systémique rendant son entretien, sa sauvegarde préventive et sa reconstruction complexe, ceci dans un cadre réglementaire à la croisée des politiques culturelles et environnementales.
A ce jour, la prise en compte de cet enjeu demeure complexe car confidentielle en France mais non moins impérative (45 000 MH répartis en 50 % privé, 50% public avec plus de 1 500 institutions culturelles). Elle concerne un mille-feuille d’acteurs issus de secteurs professionnels divers et parfois cloisonnés (ministères en charge de la Culture, de l’Ecologie et de l’Intérieur principalement), limitant l’approche globalisante au regard de la prévention des risques majeurs.
En l’état actuel de connaissances générales faibles en la matière, de compétences de maîtrise des risques limitées (au regard de la prévention et de la protection) et entre les mains de rares experts, une démarche d’acculturation croisée, tournée vers le plus grand nombre et illustrée de bonnes pratiques nationales s’avère être opportune et pertinente d’autant plus qu’elle s’inscrit dans la stratégie internationale onusienne et européenne de réduction des risques de catastrophes.
Le groupe de travail (GT) « Patrimoine Culturel et Risques Majeurs » : fruit d’un partenariat entre l’AFPCNT et le Bouclier bleu France (BbF)
L’AFPCNT et le BbF ont formalisé durant l’été 2023 leur souhait de coopérer sous la forme d’un partenariat afin de promouvoir ensemble la culture du risque auprès des différentes parties prenantes en charge de la protection du Patrimoine Culturel face aux risques naturels et technologiques dans le contexte de changement climatique.
L’ambition concernant la première phase de partenariat réside :
- dans une meilleure connaissance du profil, des attentes et des besoins des propriétaires-gestionnaires, à partir de la réalisation de sondages.
- dans l’éclosion d’une réflexion collective au service de la définition et de la création participative d’outils, ceci à partir d’un point zéro issu d’une étude socle de la problématique en France.
Fort de leurs membres et de leurs réseaux respectifs et complémentaires de partenaires, les productions font l’objet d’une co-construction, d’une relecture et d’un relai de diffusion large auprès des secteurs de la Culture, de la gestion des risques majeurs, ceci au national mais aussi dans les territoires auprès des instances décentralisées.
Au niveau de l’AFPCNT : l’AFPS, l’ANEB, la CCR, le CEPRI, le C-PRIM, le Cyprès, l’IRMa, France Assureurs, la MRN et la SMACL Assurance sont tenus informés de l’avancée des travaux, leur participation est graduelle en fonction de leur disponibilité et de leur souhait d’y contribuer ponctuellement ou en continu.
Production et perspectives
Dans un premier temps, l’AFPCNT et le BbF se sont accordés sur la priorité de mieux cerner le profil des usagers, à savoir les propriétaires et gestionnaires de biens culturels et ceci à travers les indicateurs suivants :
- connaissance et perception des risques majeurs,
- niveau présumé de préparation préventive (réalisation de mesures de protection structurelle et/ou organisationnelle type Plan de Sauvegarde des Biens Culturels – PSBC) pour faire face à un événement extrême.
Ainsi, durant l’été 2023, une trame de sondage a donc été esquissée. Ce questionnaire en ligne a été scindé en deux versions :
- la première, destinée aux propriétaires-gestionnaires publics de biens culturels,
- la seconde pour la sphère privée.
Le sondage Patrimoine Culturel et risques majeurs adressé aux propriétaires-gestionnaires publics :
La co-construction du premier sondage a permis de mobiliser des membres du BbF, de l’AFPCNT mais aussi des agents du ministère de la Culture en charge en centrale des institutions culturelles et de leur sécurité/accessibilité (MISSA). Il a fait l’objet d’une relecture en cours et finale par les membres volontaires et d’une large diffusion relai sur le web.
Les données collectées auprès d’une centaine de répondants sont présentées dans l’infographie suivante. Elles font état d’une part d’un réel besoin de renforcer non seulement la connaissance relative à l’ensemble des risques majeurs (des aléas aux outils existants comme georisques.gouv.fr par exemple) mais aussi le lien entre ces protagonistes et l’écosystème diversifié mobilisable en cas d’événement extrême, ceci afin de poser les conditions favorables à l’action de réduction des risques de catastrophes (information préventive, réalisation du diagnostic de vulnérabilité, formation au PSBC, etc.). En effet, la perception des risques majeurs et des effets du changement climatique (p. 4) mise en parallèle avec l’estimation du sentiment de préparation pour faire face à une crise (p.5) révèlent un niveau de préoccupation élevé de la part des agents ainsi qu’un souhait d’anticiper face aux risques sans être toutefois en capacité d’y répondre dans l’immédiat. Ce sentiment d’impuissance individuelle et collective à l’échelle d’un établissement s’estomperait toutefois en favorisant la montée en compétences via l’information et la formation ainsi qu’en portant à connaissance plus largement les leviers mobilisables dédiés à la prévention des risques (p. 6).
Les attentes identifiées esquissent des perspectives d’actions (p. 7) au service de la protection du Patrimoine face aux risques majeurs et selon un objectif de résilience globale et systémique souligné dans la dernière version du Plan National d’Adaptation au Changement Climatique (PNACC 3).
Le sondage « Patrimoine culturel et risques majeurs » adressés aux propriétaires-gestionnaires privés :
Le second sondage est le fruit d’une adaptation guidée par l’expertise d’associations d’usagers privés, plus précisément ici la Demeure Historique qui fédère plus de 3000 propriétaires-gestionnaires privés de Monuments Historiques en France. Sa diffusion dès juillet et jusqu’à fin septembre 2024 a permis de recueillir plus de 110 réponses. L’analyse des données recueillies est prévue pour fin d’année en cours.
L’état de l’art sur la problématique nationale « Patrimoine Culturel et Risques Majeurs » produit par l’AFPCNT avec la contribution du BbF :
Une bibliographie assortie d’une note de synthèse et d’un premier lot de fiches illustrant la patrimoine résilient face aux risques majeurs (bonnes pratiques et relèvement notamment) sont en cours de finalisation. Ces livrables ont été réalisés avec le cabinet d’études ASK (Stéphanie Likes et Mylène Florentin).