Association Française pour la Prévention des Catastrophes Naturelles et Technologiques

Séances plénières 2019

ANRN 2019 :
« L’adaptation des territoires pour une société résiliente »


Séances plénières

Télécharger le cahier 1 « Séances plénières » des actes ANRN 2019

Restitution préparée par l’Association Française pour la Prévention des Catastrophes Naturelles (AFPCN)

 


RESUME EXECUTIF

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Les 25 et 26 mars 2019, plus de 900 acteurs de la gestion des risques naturels se sont réunis au Corum de Montpellier pour la quatrième édition des Assises Nationales des Risques Naturels (ANRN), organisées par le Ministère de la Transition Écologique et Solidaire (MTES).

En ouverture, François de Rugy, Ministre de la Transition écologique et Solidaire, a insisté sur le contexte  du changement climatique qui accroit encore les enjeux de prévention des risques naturels, pour éviter un  coût croissant des catastrophes. Il a rappelé que ses principales préoccupations sont l’amélioration de la connaissance et des outils de la prévention des risques, et l’association des collectivités et des citoyens à la mise en œuvre des politiques de prévention au niveau des territoires.

Les débats ont été introduits ensuite par une table ronde sur le thème des deux journées : « l’adaptation des territoires pour une société résiliente ». Les participants ont été mobilisés en ateliers de travail autour de six thèmes fondamentaux pour les partenaires de la prévention des risques :

  1. Synergies de l’aménagement, la prévention des inondations et la protection des milieux aquatiques,
  2. Vulnérabilité et résilience des bâtiments,
  3. Se préparer à la gestion du post-événement,
  4. Attractivité touristiques et risques naturels,
  5. Le numérique, les nouvelles technologies et la gestion des risques : valeur ajoutée et modèles économiques associés,
  6. Place des acteurs économiques dans la prévention des risques naturels.

Après la restitution, en plénière, des travaux des ateliers, une seconde table ronde a permis de réfléchir sur « l’implication de tous les acteurs dans la prévention des risques » avant que les conclusions des assises soient tirées par Christian Kert, Président du COPRNM, Marie-France Beaufils et Daniel Marcovitch, coprésidents de la CMI.

Quelques principaux messages ressortent de ces assises :

  • Une demande forte et générale de partage de la connaissance pour développer la culture du risque chez tous les acteurs, ce qui suppose l’existence de bases de données et d’informations aisément accessibles et interopérables ;
  • La valorisation du travail des élus locaux à toutes les échelles de territoire, en particulier dans les PAPI et SLGRI, pour y développer la culture du risque et la solidarité entre acteurs locaux, en intégrant une implication des acteurs économiques ;
  • La nécessité de se mobiliser pour concrétiser plus vite la mise en œuvre les démarches de prévention, en cherchant à lever les différents freins
  • La prévention des risques naturels ne doit plus être isolée des autres politiques publiques contribuant à l’aménagement des territoires. Dans ce sens, la GEMAPI est une bonne démarche, il faut laisser aux acteurs le temps de s’en saisir.
  • Enfin, quelques proposition concrètes ont été faites comme : organiser un dimanche de la prévention, une journée spéciale pour les scolaires et créer un crédit d’impôt pour la prévention en direction des entreprises.

En plus des débats thématiques et des plénières, les ANRN ont aussi connu, comme les précédentes, des événements complémentaires, notamment cinq conférences, une exposition de posters scientifiques et les stands des partenaires des Assises. Cependant, la nouveauté de cette session a été l’organisation de « l’Agora des bonnes pratiques » sous la forme de mini-conférences sur des cas concrets choisis via un appel à contributions permettant un partage, et le cas échéant, une reproduction. Enfin, des visites de terrain organisées par la Métropole de Montpellier ont conclu l’ensemble.

De l’avis de beaucoup de participants, ces ANRN ont été très chaleureuses et conviviales, permettant de nombreux contacts. Les organisateurs locaux, la Ville de Montpellier, sa communauté urbaine et la DREAL Occitanie, doivent donc être remerciés pour le choix du lieu et son aménagement, qui ont permis le brassage des idées.

Les actes qui suivent rendent compte dans les grandes lignes des principaux débats et événements. Ils consistent en un livret central, rassemblant l’essentiel des sujets abordés, des questions posées et des propositions pour l’avenir, renvoyant à un site internet où sont rassemblées la plupart des contributions.

Alors, bonne lecture, en attendant de vous revoir lors de la prochaine session des Assises.

Le Comité d’Organisation des ANRN…

DISCOURS D’OUVERTURE

Lire les discours d'ouverture

Anette Burgdorf Journaliste, animatrice

Bonjour à toutes et à tous et bienvenue aux Assises Nationales des Risques Naturels. Je suis Anette Burgdof, journaliste franco-allemande est je suis ravie d’animer les débats de ces deux jours. D’abord je voudrais vous remercier d’être venus nombreux : la salle est presque pleine donc nous sommes presque 900 personnes réunies aujourd’hui. Vous êtes des experts, des acteurs du public et du privé également, des risques naturels et de la prévention et de la gestion.

Comment adapter les territoires pour une société résiliente ? C’est le thème de cette édition 2019. Nous savons tous qu’il y a urgence d’agir. Le changement climatique place la prévention et la gestion des risques naturels au cœur de l’actualité et aussi au cœur de l’action et des préoccupations des responsables politiques, des collectivités locales, des institutions et des acteurs économiques, pour les prochaines années.

L’objectif de ces deux jours est d’échanger, de contribuer, de réunir les forces pour créer des synergies entre tous les acteurs de la prévention des risques, mais aussi pour sensibiliser encore mieux les citoyens sur ces sujets, parce qu’adapter les territoires pour une société plus résiliente veut dire également qu’il faut parler de la prévention mais aussi qu’il faut penser et mettre en place les outils de cette résilience dès la phase de la pré-crise.

Durant ces deux journées, nous aurons deux matinées en plénière. Cet après-midi sera consacré à des ateliers afin de réfléchir tous ensemble pour construire la politique de prévention des risques de demain et l’après-midi de demain sera consacré à des visites des sites sur les territoires de Montpellier.

Nous allons tout de suite rentrer dans le vif du sujet avec notre séquence d’ouverture. Comment l’État et les collectivités locales travaillent ensemble ?

Philippe Saurel, Président de Montpellier Méditerranée Métropole et Maire de Montpellier

Monsieur le Ministre, mesdames et messieurs les parlementaires, mesdames et messieurs les élus, monsieur le préfet de l’Hérault, mesdames et messieurs qui venaient de toute la France et au-delà, je suis très heureux en tant que maire de la ville et Président de la métropole de vous accueillir pour ces Assises Nationales des Risques Naturels. Je vous remercie très sincèrement du choix de Montpellier qui est une ville comprise dans un amphithéâtre vert naturel, et entre cet amphithéâtre et la mer se trouve la ville, dans un piémont naturel qui lui donne sa qualité de vie, à proximité de la campagne mais aussi à toute proximité de la mer, mais l’expose en même temps à de nombreux risques.

Pour ce qui est des risques naturels majeurs, que ce soient les incendies, les inondations, et l’an dernier la neige et le verglas, même si Montpellier n’a pas l’allure d’une station d’hiver, les effets du réchauffement climatique se font sentir de façon très prégnante, dans notre métropole et dans notre ville. C’est la raison pour laquelle nous avons dès 2014 mis en place les conditions nécessaires pour pouvoir prévenir et s’adapter le plus rapidement possible.

L’eau tout d’abord, très prégnante à Montpellier, à un mètre au-dessous de la surface du sol, avec de nombreux ruisseaux souterrains, des nappes phréatiques importantes de différents niveaux, des épisodes de cévenol. Lorsque la mer pousse par vent marin, les épisodes de cévenol qui descendent des Cévennes et la mer qui rentre en même temps, font monter les nappes et inondent tout, comme ce fut le cas en 2014 et 2015. Des risques d’incendie, jusque l’an passé, aux portes de la ville, avec une garrigue très sèche, faite de buisson, de chêne, de genévrier, de pin, autant de végétaux très inflammables qui, poussés par le vent, deviennent difficile à contrôler.

Nous avons mis en place, avec la métropole, un système de surveillance fait de capteurs, de caméras, pour les inondations et les incendies, mais surtout nous avons pris de grandes décisions sur l’aménagement du territoire, car c’est peut-être là que nous devons être le plus vigilant, dans l’élaboration notamment du schéma de cohérence territoriale, où nous avons pris comme orientation majeure la protection de deux tiers de l’espace métropolitain pour l’agriculture, la viticulture, l’arboriculture, et permettre au sol d’avoir la transparence hydraulique naturelle pour pouvoir éviter les effets de ruissellement qui sont très néfastes pour les villes. Nous avons également pris la décision de rendre parcelle à parcelle, perméable, l’ensemble des nouvelles constructions qui se situent sur le territoire de la ville, ce qui nous oblige aussi à densifier le tissu urbain pour rendre encore disponible à l’environnement et aux effets hydrauliques beaucoup plus réceptifs sur les zones qui ne sont pas construites.

Il y a aussi la volonté, pour nous, de reprendre un certain nombre d’usages de matériaux que nous avions, pour la construction, intégrés dans un guide, le guide AURA « Améliorer l’Urbanisme par un Référentiel d’Aménagement »  aujourd’hui en cours de réflexion et validé par le ministère de l’Environnement il y a une dizaine d’années, qui est à l’intention des constructeurs, des bâtisseurs, de tous ceux qui souhaitent réaliser des programmes immobiliers et qui accorde une note en termes de durabilité sur l’ensemble des projets.  Ce guide aujourd’hui tient compte de la notion des risques et permet à chaque promoteur de pouvoir évaluer la dangerosité ou les effets pervers des constructions qu’il décide. Nous avons mis en place tous ces système-là, à la ville et à la métropole, et est venu l’an dernier s’ajouter un plan neige particulier, car Montpellier connait la neige une fois par siècle, mais lorsqu’elle tombe elle tombe de 40 cm en deux heures, ce qui fait dérailler les tramways, casse les arbres et bloque toute l’activité humaine. Il a fallu donc se résoudre à mettre un plan spécifique pour ce risque naturel et l’intégrer dans le schéma global des risques inondation, incendie, et depuis l’an passé, neige.

Les années 2014 et 2015 ont été difficiles pour nous car même si, et heureusement, il n’y a pas eu de victimes, parce que les habitants sont habitués à cette situation, les inondations ont bloqué la ville pendant de nombreuses semaines, et l’ont rendu impraticable. La première décision qui a été prise suite à ces inondations a été de positionner des sirènes étatiques sur 13 bâtiments publics de la ville (écoles, mairies) qui sont activées tous les 1ers mercredis du mois, à midi, afin de pouvoir renseigner l’ensemble des populations de façon simple du risque encouru, ces sirènes pouvant être utilisées pour d’autres raisons dans ce monde qui est souvent contraint par la violence. Ces sirènes aujourd’hui sont en cours d’augmentation, ville et métropole, ce qui nous permet d’avoir une action directe en cas de risque subi.

Voilà mesdames et messieurs ce que je voulais vous indiquer très rapidement, car il faudrait plusieurs tables rondes pour exprimer en détail tout cela. Encore une fois merci d’avoir choisi Montpellier pour vous réunir et réunir ces assises. Merci à Monsieur de Rugy, ministre de l’environnement, d’être à nos côtés une fois encore à Montpellier et je le remercie particulièrement pour sa présence à nos côtés, présence efficace qui nous aide dans projets environnementaux, que ce soit la zone à faibles émissions que nous sommes en train d’installer dans la ville, que ce soit tout ce qui concerne les mobilités actives et le plan vélo dans lequel nous nous sommes lancés. J’en profite pour saluer Elisabeth Borne, ministre des transports, avec qui nous travaillons sur ce sujet, à la suite de Nicolas Hulot. Merci à vous d’être présents à Montpellier, Montpellier vous accueille sous le soleil. Je vous incite à participer aux tables rondes et, si le temps vous le permet, profitez.

François de Rugy, Ministre de la Transition écologique et solidaire

Merci Monsieur le Maire, Monsieur le Président de la métropole, cher Philippe Saurel, pour ces mots d’accueil et ces propos qui viennent introduire aussi de façon très concrète ces Assises Nationales des Risques Naturels. Mesdames et messieurs les parlementaires, mesdames et messieurs les élus, je sais que vous êtes nombreux aujourd’hui pour ces assises, monsieur le préfet. Je voudrais vraiment saluer d’abord toutes celles et tous ceux qui ont contribué à la bonne organisation de ces assises au premier rang desquels vous, monsieur le maire, et les services de votre ville et de votre métropole. Mais je voudrais aussi évidemment saluer le choix de Montpellier pour organiser ces assises puisque c’est à la fois, vous venez de la rappeler, une ville où il fait bon vivre, peut-être une des villes symboles en France de la qualité de vie mais aussi une ville où on sait ce que c’est que le risque naturel et vous en avez donné quelques exemples.

Je voudrais saluer évidemment la participation extrêmement importante qui montre à mes yeux que ce sujet est aujourd’hui un sujet qui nous concerne presque toutes et tous, en tout cas des millions de personnes en France vivent dans des zones qui présentent d’une façon ou d’une autre un risque naturel et il faut regarder ce risque en face et savoir le traiter avec ces mots clés qui sont affichés des deux côtés de la scène et qui je crois résument bien en effet toutes les actions que nous avons menées pour nous prémunir, nous protéger, contre les risques naturels comme bien sûr toutes les autres formes de risques.

Je voudrais adresser un salut particulier non seulement aux élus locaux mais parmi eux aux maires qui, je le sais, sur tous les sujets sont à la fois souvent la voix de la République sur nos territoires, mais aussi l’oreille de la République, et ils sont celles et ceux qui sont en première ligne pour recueillir souvent, il faut bien le dire, les plaintes de nos concitoyens mais aussi parfois leurs demandes et en matière de risques naturels. Je sais que ce n’est pas facile à gérer. J’ai encore en mémoire ce que m’a dit le maire de Villegailhenc dans l’Aude, que j’avais rencontré en octobre dernier, le lendemain de cette nuit où des inondations extrêmement violentes avaient déferlé nous seulement sur sa commune mais sur le département faisant des victimes et où il m’a dit, quand nous marchions dans sa commune pour aller voir à la fois les maisons abîmées, un pont arraché, une voirie souvent dévastée, il me disait « vous savez ce qu’il y a de plus dur, tout le reste de l’année, c’est de savoir dire non aux demandes qui lorsque le souvenir de ces inondations même dramatiques fini par s’estomper avec le temps, dire non aux demandes d’urbanisation, aux demandes de construction, aux demandes de modification à deux plans locaux d’urbanisme » et il dit « pourtant il nous faut savoir dire non parfois, pour protéger nos populations »,  j’ai envie de dire par temps calme, car c’est par temps calme qu’il faut prendre les bonnes décisions pour faire face à la tempête, et malheureusement au sens propre comme au sens figuré.

Ces assises ont été lancées en 2012, à l’époque je pense que c’était avec peut-être une conscience moins forte qu’aujourd’hui de ce que peuvent représenter les risques naturels et l’intensification très probable des risques naturels. Je salue le fait qu’on puisse continuer ces travaux de réflexion qui sont nécessaires à l’action alors que, sans aucun doute, le dérèglement climatique nous conduit à voir aujourd’hui ses effets directs, palpables, sur nos territoires, comme la dit monsieur le maire de Montpellier tout à l’heure, à la fois dans la France métropolitaine et Outre-mer. J’ai aussi en mémoire un déplacement que j’avais effectué dans d’autres fonctions, en tant que président de l’Assemblée nationale, en novembre 2017, quelques semaines après le passage du cyclone Irma sur les Antilles et qui avait fait tant de dégâts à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy et dans une moindre mesure à la Guadeloupe, et j’ai pu mesurer à ce moment-là, là aussi ce que pouvait représenter l’intensification des effets du dérèglement climatique. Mais j’ai aussi en mémoire, étant élu de l’Ouest de la France, de Nantes, ce qui s’est passé il y a 9 ans avec la tempête Xynthia, et là aussi les effets dévastateurs que cela avait pu avoir quand il n’y a pas la bonne préparation, et même il faut bien le dire, là c’était un cas particulier, une forme de déni face aux risques, déni dans la gestion public au long cours de la prévention des risques mais aussi une forme de déni lorsque le risque se présente et que les alertes sont faites et qu’elles ne sont pas transmises à la population, on peut avoir là des conséquences malheureusement dramatiques.

Tous ces événements doivent nous inciter plus que jamais, non seulement à regarder le risque en face, mais à prendre les bonnes mesures car, au-delà des drames d’humains qui peuvent se jouer, il y a des victimes aujourd’hui encore dans notre pays : les inondations tuent. Il y a aussi bien sur les dégâts matériels extrêmement importants, et je salue aussi la présence parmi nous aujourd’hui du préfet Philippe Gustin, aujourd’hui préfet de la Guadeloupe, mais qui après le cyclone Irma avait été nommé délégué interministériel à la reconstruction, et qui avait pu mesurer l’ampleur des dégâts et le coup d’ailleurs souvent difficile à chiffrer de ce cyclone qui avait été évalué à 2 milliards d’euros, ce qui montre ce que coûte ces événements climatiques extraordinaires.

Ces tempêtes, ces cyclones, ces pluies violentes, toutes ces catastrophes impactent à la fois durement et durablement nos territoires. Durement, je crois que maintenant tout le monde en est conscient, compte tenu de la médiatisation toujours intense qui se produit dans ces moments-là mais qui évidemment ne dure pas. Un sujet d’actualité chasse l’autre et on pourrait oublier l’impact durable, et pourtant c’est bien l’action dans la durée qui est absolument nécessaire, parce que c’est à la fois agir au-delà justement de la médiatisation, de ce temps de l’émotion médiatique, mais c’est aussi et surtout agir en amont pour atténuer les facteurs de risque. Là aussi que ce soit les élus ou les représentants des pouvoirs publics, après chaque catastrophe, nos concitoyens nous interrogent, nous interpellent, nous, les responsables politiques quant à notre autre action passée. Parfois il y a de mauvaises polémiques mais il y a des interrogations légitimes, et nous devons aujourd’hui absolument nous projeter malheureusement dans un avenir où ces événements climatiques, particulièrement dévastateurs, vont probablement se multiplier et être encore plus intenses.

Sans attendre nous devons donc travailler à atténuer l’impact du dérèglement climatique sur les risques pour nos territoires. Il ne faut pas simplement agir sur les causes, il faut absolument agir pour limiter les causes du dérèglement climatique, mais il faut aussi agir dès maintenant pour atténuer ses effets. Nous connaissons les manifestations de ces effets du dérèglement climatique, les précipitations accrues plus violentes, la hausse du niveau des mers, les risques de submersion qui vont avec, les cyclones plus intenses, mais aussi les effets indirects des sécheresses, comme bien sûr les feux de forêt, comme vous venez de le rappeler monsieur le maire à l’instant pour ce qui concerne votre région, mais on peut le voir chaque été en France et sans doute malheureusement dans des régions de plus en plus nombreuses.

Les menaces sont multiples et la protection de nos concitoyens doit donc être une priorité. Mais cela a un prix et il faut le dire aussi, et je suis convaincu que vous en parlerai très concrètement tout à l’heure, et notamment monsieur le directeur général de la Caisse centrale de réassurance (CCR), monsieur Bertrand Labilloy, que j’ai rencontré il y a peu de temps et qui présentera sans aucun doute des données précises en la matière. Ces deux dernières années par exemple, le coût des catastrophes naturelles a atteint des niveaux record : près de 3 milliards d’euros en 2017, 2 milliards d’euros en 2018, et nous considérons que d’ici 2050, même en luttant avec acharnement contre les causes du dérèglement climatique, et bien ces montants pourraient être multipliés par deux. Protéger les populations, préserver des vies, mais aussi donc stabiliser sur le long terme le coût de ces dommages, alors que nos populations augmentent est en soit un objectif. Cela nécessitera de renforcer encore les efforts de prévention. Aujourd’hui, le rapport entre les moyens investis dans la prévention et le coût des indemnisations, et donc on peut dire d’une certaine façon les moyens financiers investis dans l’indemnisation, est encore de 1 à 10. C’est donc 10 fois plus pour la réparation des dégâts que pour la prévention.

Anticiper davantage ces risques et les prévenir, c’est le sens du plan national d’adaptation au changement climatique, qui n’est que le début d’une mobilisation que j’ai lancé en décembre dernier. Agir plus en amont, cela nécessite d’abord d’améliorer notre connaissance des risques nouveaux et d’améliorer nos outils pour les gérer. Ainsi, et je parle sous le contrôle de Monsieur Jean-Marc Lacave de Météo France, cet opérateur de l’État va par exemple déployer de nouveaux moyens, cinq nouveaux radars d’ici 2021, ainsi qu’un nouveau supercalculateur, beaucoup plus puissant, qui permettra donc d’affiner les prévisions et donc les alertes. Je tiens à préciser que ce supercalculateur représente un investissement de près de 150 millions d’euros, donc payé par l’État.

L’érosion du trait de côte touche également un nombre croissant de nos littoraux, et je me rendrai d’ailleurs après ces assises sur l’étang de Thau et je sais combien la question de l’érosion du trait de côte est un sujet dans cette région Occitanie, et notamment dans ce département de l’Hérault.

En dépit de la stratégie nationale dont nous nous sommes dotés sur le sujet en 2012, nous faisons tous collectivement le constat que les outils dont nous disposons demeurent insuffisants, notamment en termes d’aménagement et de financement. Les collectivités peuvent parfois se sentir démunis alors qu’elles sont en première ligne pour gérer les conséquences de ce problème. Nous devons donc aller plus loin et le gouvernement confiera dans les prochaines semaines une mission à un parlementaire pour proposer les évolutions nécessaires, notamment sur le plan législatif. Je souhaite qu’une large concertation puisse ensuite s’engager avec les collectivités, fin 2019, en se basant à la fois sur les préconisations de cette mission mais aussi sur les travaux en cours sur le sujet dans les différents cercles réunissant justement les collectivités.

En montagne, la hausse des températures entraîne déjà une fonte rapide des glaciers et l’apparition de risques nouveaux : chutes de bloc de glaciers, vidange brutale des poches d’eau contenues dans les glaciers. Nous mobiliserons des 2019 les équipes de recherche spécialisées et les opérateurs de l’État pour mieux connaître l’évolution des risques glaciaires et ainsi définir, avec les collectivités locales, les mesures nécessaires comme le renforcement de la surveillance sur certains points identifiés comme sensibles.

A Mayotte, et même si cela n’est pas directement lié au dérèglement climatique, nous finançons l’instrumentation géophysique de la région, en collaboration avec le CNRS. Déployé au premier semestre 2019, elle nous permettra de mieux comprendre l’origine de l’intensification des secousses qui frappent l’île depuis mai 2018. Mais pour agir plus efficacement, nous devons aussi agir plus que jamais collectivement.

Si les citoyens sont pleinement légitimes à interpeller les élus et les responsables des services publics à l’issue des événements extrêmes, des catastrophes naturelles, notre responsabilité en tant qu’élus nationaux et locaux et en tant qu’acteurs de la prévention des risques, est aussi de jouer le rôle d’aiguillon en amont. On a longtemps d’ailleurs qualifié mon ministère de ministère aiguillon, et il doit l’être sans aucun doute, mais pas seulement comme on l’entendait autrefois vis-à-vis des autres ministères : il doit aussi l’être auprès des citoyens, notamment grâce à vous, grâce à votre relais, notamment celui des élus locaux.

Chaque année des imprudences individuelles causent des drames individuels et collectifs. Je pense bien sûr aux feux de forêt en été ou encore aux comportements imprudents en cas de crue, ne serait-ce par exemple que l’idée de prendre sa voiture et de prendre la route alors que c’est justement là qu’on se met en danger. Pour les prévenir, nous devons diffuser en amont la culture du risque, et communiquer plus largement. Nous renouvellerons donc en 2019 nos campagnes de communication grand public concernant ces risques. Je veux saluer à cet égard l’initiative des préfets des Antilles et de certaines collectivités qui ont su expérimenter, avec leurs habitants, un test grandeur nature de leur plan communal de sauvegarde. Il s’agit d’un levier efficace de la culture du risque dont l’expérimentation gagnera à être étendue, et nous regarderons si cela peut se faire dans d’autres collectivités métropolitaines.

La prévention, cela passe par une stratégie de territoire face aux risques, c’est pourquoi je suis très attaché aux programmes d’action pour la prévention des inondations, qu’on appelle parfois PAPI. Ils permettent de faire émerger de véritables projets de territoire, à l’initiative des collectivités, cofinancés et déployés à une échelle pertinente. Je tiens à dire que depuis leur création, près de 2 milliards d’euros ont été investis par les collectivités de 85 territoires, dans la prévention du risque inondation dont 800 millions d’euros apportés par le fonds Barnier, qui est lui alimenté par une cotisation sur les contrats d’assurance payé par nos concitoyens. Il a donc véritablement un effet levier et je souhaite que nous rendions pour les collectivités l’élaboration de ces programmes PAPI encore plus fluide et leur mise en œuvre encore plus rapide. Dans cet objectif, j’ai demandé qu’un diagnostic et des propositions soient établis d’ici l’automne 2019. Cette réflexion devra étroitement associer la Commission Mixte Inondation (CMI), dont je salue les deux présidents ici présents, Madame Beaufils et Monsieur Marcovitch.

La prévention passe enfin par une action résolue en matière d’urbanisme et de construction, tant sur le plan de la réglementation que de l’expérimentation et de l’accompagnement. Sur le plan réglementaire, je signerai dans les prochaines semaines un décret clarifiant les règles encadrant l’élaboration des plans de prévention des risques d’inondation, ce qui facilitera leur élaboration et leur adoption. Je salue le travail constructif réalisé avec les associations de collectivité pour finaliser ce décret. Pour imaginer des territoires plus résilients, je veux laisser davantage de marge de manœuvre à l’expérimentation. Ainsi, avec la Ministre de la cohésion des territoires, et en lien avec le plan urbanisme construction architecture, et le Cerema, qui est un service de mon ministère, mon ministère lancera dans les semaines à venir un appel à manifestation d’intérêt visant à mieux aménager les territoires en mutation exposés aux risques naturels.

Nous devons enfin mieux accompagner et soutenir les actions de réduction de la vulnérabilité. Comme le Président de la République l’a annoncé, suite aux crues de l’Aude, nous allons accroître de 40 à 80 % le taux de soutien aux travaux de réduction de la vulnérabilité des particuliers. Dans les Antilles, nous travaillons à dynamiser le plan séisme Antilles et renforçons dans la loi de finance de 2019, les moyens du fonds Barnier dédiés au renforcement du bâti. Pour les bâtiments de gestion de crise, les HLM, les établissements scolaires, entre 2016 et 2020, l’État a prévu d’y consacrer près de 450 millions d’euros. La plupart de ces mesures de prévention s’appuient sur l’action déterminante des collectivités. Un cadre de gouvernance stabilisé s’impose donc pour ne pas freiner les projets qui émergent. La mise en place de la compétence dite GEMAPI (Gestion des Eaux et des Milieux Aquatiques et Prévention des Inondations), effective depuis le 1er janvier 2018, est une réforme très importante. Elle doit favoriser une gestion intégrée et efficace du risque inondation dans notre pays. Il faudra d’ailleurs l’articuler avec des logiques de bassin, qui dépassent largement les limites bien-sûr des structures intercommunales, et on pourra s’appuyer sans aucun doute sur les établissements publics territoriaux de bassin pour cela.

Le Gouvernement est à l’écoute des difficultés de mise en œuvre rencontrées dans certains territoires où cette compétence GEMAPI a pu apparaître comme une remise en cause d’action conduite de longue date par d’autres acteurs, notamment je pense aux départements. La loi Fesneau, qui a été adoptée dès la fin de l’année 2017, me paraît offrir les assouplissements qui permettent à chaque territoire de retenir l’organisation et la gouvernance les plus adaptés. Nous assouplirons également prochainement les délais dont disposent les collectivités pour solliciter une autorisation simplifiée de leur système d’endiguement. Un délai supplémentaire pourra être sollicité dans les cas qui le justifient, auprès des préfets. Au-delà de ces ajustements, ce cadre doit être à présent stabilisé, car beaucoup de collectivités ont su faire évoluer leur mode de gestion, et nous devons leur offrir désormais la visibilité nécessaire pour conduire de véritables stratégies et actions opérationnelles au bénéfice des territoires, d’autant plus que cela demande du temps, un engagement dans le temps, et il ne faut donc pas changer l’organisation fréquemment.

En conclusion, je voudrais vous redire ma détermination à regarder la réalité des risques en face et à la faire partager avec les Français. Il y a à mon sens deux écueils : celui du catastrophisme d’un côté, et celui du déni de l’autre, qui dans les deux cas, peuvent amener malheureusement à ne rien faire. Il ne s’agit pas de vivre avec la peur du risque au ventre en permanence, il s’agit de vivre avec le risque, sa prise en compte et sa prévention. Sa prévention par des aménagements et des investissements bien sûr, et j’ai évoqué des chiffres importants, mais aussi tout simplement par l’adoption des meilleurs comportements en cas d’alerte par rapport à toute forme de risque de catastrophe naturelle. J’aurais besoin de vous pour remplir ces objectifs et conduire ces chantiers importants dans les prochains mois et les prochaines années. Je sais pouvoir compter sur votre engagement, votre savoir-faire, votre compétence, votre mobilisation en ce sens au service de la protection de nos concitoyens. Je vous souhaite les meilleures réflexions, pour les actions les plus efficaces. Merci.

INTERVENTION DE DEUX GRANDS TEMOINS SUR LES QUESTIONS DU CHANGEMENT CLIMATIQUE

Avec Jean-Marc Lacave (PDG de Météo-France) et Bertrand Labilloy  (Président de la Caisse centrale de réassurance)

Rôle de Météo-France dans la prévention des risques naturels

 

 Jean-Marc Lacave (Météo-France)

Météo-France surveille et prévoit l’évolution de l’atmosphère, de l’océan superficiel et du manteau neigeux. Tous les outils d’observation, stations terrestres, radars, satellites sont absolument fondamentaux pour bien connaître l’état initial dans lequel nous sommes. Il faut comprendre les phénomènes à l’œuvre pour qu’on puisse simuler le comportement de tout cela le mieux possible. Notre enjeu ensuite est de faire les prévisions qui vont de la très courte échéance (quelques heures) à la prévision à 50 ou 100 ans de nature climatique. L’enjeu dans la prévision, c’est d’une part de ne pas se tromper (la science est encore nécessaire pour comprendre parfaitement tout ce qui est à l’œuvre notamment dans les phénomènes intenses et les orages les plus intense) et, d’autre part, gagner quelques heures en anticipation sur l’intensité et la localisation d’un phénomène ce qui est pour nous crucial. Beaucoup d’énergie est mise dans cette recherche permanente, à toutes les échelles de temps et à toutes les échelles d’espace, pour être le plus performant. Mais il ne suffit pas d’anticiper, il faut aussi communiquer correctement. Il existe les processus de vigilance qui sont un vecteur très important de communication de l’information et auquel il faut qu’on soit très soigneux car la vigilance doit être bien comprise.

Conséquences du changement climatique sur les risques naturels

Jean-Marc Lacave (Météo-France)

Météo-France a développé un modèle « Arpège Climat » qui est un modèle de simulation reconnu comme un des meilleurs mondiaux. Ce modèle permet aujourd’hui de dire qu’avec l’élévation des températures générales, nous nous attendons une augmentation des températures estivales et une recrudescence des vagues de chaleur. Concernant la pluie nous n’avons pas de signal fort en matière de cumul, mais il est possible de dire que l’intensité des pluies extrêmes va augmenter. Corrélativement sur la sécheresse des sols, on s’attend très probablement à une extension géographique de la sécheresse des sols autant en hiver qu’en été, due plutôt à la température qui est plus élevée et qui provoque plus d’évaporation. Il y a également les feux de forêt qui vont être plus fréquents dans l’avenir. Concernant les tempêtes, il n’y a pas de signal particulier au niveau de la métropole et même de l’Outre-Mer. Pour les cyclones, il est simplement possible de dire que s’il n’y a pas d’augmentation en fréquence, il est probable qu’il y ait une augmentation en intensité. On peut dire aussi que sur les océans, du fait de l’élévation de la hauteur d’eau, nous attendons une augmentation des submersions marines, des inondations littorales, que ce soit en métropole ou en DOM-TOM. Et puis enfin, sur les avalanches, nous nous attendons à une réduction du nombre d’avalanches et à une augmentation de la hauteur d’arêtes de ces avalanches mais avec des risques nouveaux sur les poches d’eau par exemple ou les chutes de pierres.

Conséquences économiques du changement climatique

Bertrand Labilloy (CCR)

Les conséquences économiques du changement climatiques sont observables si on se projette dans le passé, durant les 40 dernières années. On a pu voir au niveau mondial l’augmentation très forte des dommages annuels causés par les catastrophes naturelles d’une dizaine de milliards d’euros de dollars par an avant 1980, a des années exceptionnelles à 40 milliards entre 1980 et 2000. Sur les 20 dernières années il y a eu des années avec des cumuls pour les catastrophes naturelles de plus de 130 milliards de dollars. Cela est lié au fait que, globalement, au niveau de la planète, on est plus riche et on s’assure plus, mais pas seulement. C’est également lié au changement climatique qui ne se traduit pas seulement par une élévation tendancielle et continue de la température moyenne de la planète, mais aussi par l’accroissement de la fréquence et de la sévérité des phénomènes climatiques extrêmes. On a un certain nombre d’indications qualitatives de ces changements mais cela ne suffit pas. Il faut avoir une appréciation quantitative. Il faut comprendre, modéliser, quantifier, ce qui permet d’anticiper, de prévoir, de s’adapter aux changements dans la sérénité. C’est ce que nous faisons en partenariat avec Météo-France, le BRGM…  Nous avons un modèle qui nous sert, exactement comme pour le modèle météorologique Arpège, pour des besoins à très court terme juste après une catastrophe naturelle pour en anticiper le coût, à moyen terme pour calculer quel doit être le tarif adéquat pour couvrir les catastrophes naturelles, et à long terme pour anticiper l’évolution du coût de la catastrophe naturelle. Nous poursuivons cette étude dans les Outre-mers avec la problématique particulière des cyclones. Sur l’évolution des dommages économiques au changement climatique pour le territoire métropolitain, il y a une partie liée à l’enrichissement de la population et un développement économique, et il y a une partie liée au fait que la fréquence des catastrophes naturelles va augmenter, avec aussi un phénomène de concentration des populations dans les zones à risques. Ces deux derniers phénomènes jouent pour plus 50 % de dommages à population et à richesse égales, en sachant que ce sont des moyennes (35 % pour la fréquence d’intensité des phénomènes naturels, 15% pour le déplacement des populations et des activités économiques). Tous les détails sont dans l’étude.

Travaux conjoints des deux organismes

Jean-Marc Lacave (Météo-France)

Nous sommes très attachés à Météo-France à développer ce qu’on appelle les services climatiques. Cela fait au moins une dizaine d’années qu’on en a fait une priorité stratégique. Il y a deux volets dans ce qu’on appelle le service climatique :

–            Partie « Porter à connaissance ». Il faut qu’on puisse faire bénéficier le plus grand nombre des informations de la connaissance dont on dispose. Nous avons pour cela mis en place pour cela des portails (DRIAS les futurs du climat à destination plutôt des professionnels et des bureaux d’études, Climat HD avec une mise en perspective du climat passé et des projections pour le futur).

–            Partie « services » proprement dit qui est venue assez naturellement par le croisement des expertises avec tous les opérateurs, tous les acteurs publics et privés qui ont besoin de ces informations. On a eu beaucoup de travaux croisés avec des opérateurs public (le Cerema, l’ONF, l’Irstea, le BRGM…). Tous les opérateurs publics sont assez largement mobilisés avec nous sur ces questions et développent une connaissance plus sectorielle des impacts pour mieux informer les populations et les acteurs locaux sur ce qui va réellement pouvoir se passer.

L’avantage d’avoir un modèle qui peut être régionalisé, qui peut faire de la descente d’échelle sans rentrer dans un détail trop scientifique et nous arriverons à avoir des prévisions climatiques sur l’îlot de chaleur urbain. On arrive à avoir des informations sectorielles pour les forêts, l’énergie, l’eau, la sécheresse etc. et tous les opérateurs publics et aussi privés (CCR, Chambres d’Agriculture, entreprises qui ont à disposition un outil de diagnostic de leur propre climato-sensibilité…), pour effectivement mieux appréhender le futur et l’adaptation à ce changement climatique. Météo France est très attachée à ce rôle d’irrigation de la formation et d’animateur de ces réseaux d’expertise pour pouvoir effectivement faire que ça se diffuse et ça bénéficie au plus grand nombre.

Ces simulations sont de plus en plus sophistiquées, elles intègrent le cycle du carbone, les aérosols, elles sont évidemment de plus en plus complexes parce que toutes les interactions physiques, chimiques avec la glace de mer, avec les océans, avec les forêts etc. Tout cela rend évidemment les modèles de plus en plus complexes, mais ils sont capables aujourd’hui de nous donner des projections à ces échéances de temps là et ensuite on est capable de zoomer sur les territoires.

Bertrand Labilloy (CCR)

Ces travaux scientifiques permettent de prévoir effectivement la robustesse, la résilience de ce régime d’indemnisation aux conséquences du changement climatique. Ce régime a été mis en place une fois en 1982, il a un bilan qui est tout à fait positif. Il a permis d’indemniser rapidement les sinistrés et à tout le monde de se couvrir à un prix tout à fait raisonnable. Il a permis aussi de protéger les finances publiques. Par ailleurs, on voit des travaux de modélisation effectués en modifiant seulement quelques paramètres, ce régime devrait être capable de faire face aux évolutions dont on parle depuis quelques minutes. Cela ne veut pas dire que tout est parfait et qu’il n’y a pas besoin de changer telle ou telle chose. Le Président de la République a annoncé en septembre dernier sa volonté qu’un projet de loi soit déposé pour moderniser le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles dans le but d’améliorer l’indemnisation, de responsabiliser les différents acteurs, et de renforcer très significativement la prévention des risques. Avec la fréquence plus grande de certaines catastrophes naturelles, il devient nécessaire de redéfinir ce qu’on entend par un « événement climatique extrême d’ampleur inhabituel » pour qu’on sache ce qui relève de l’assurance ou pas. Dans le cadre de la réforme, il y a un projet de faire couvrir les dommages causés aux bâtiments nouvellement construits dus à la sécheresse par l’assurance construction. Il est important que les constructeurs et promoteurs intègrent dans les spécifications des nouvelles constructions, la nécessité de prendre en compte la nature du sous-sol et de définir de façon convenable les fondations. Même si ce n’est pas en lien avec l’assurance construction, il est important qu’on prenne en compte l’ensemble des risques météorologiques climatiques quand on construit des bâtiments, y compris les bâtiments publics. Il faut vraiment renforcer la prévention. Les travaux menés avec Météo-France permettent également de quantifier l’intérêt de cette prévention. De la même manière que Météo France est capable de faire des prévisions à petite échelle géographique, nos modèles nous permettent également de zoomer sur une région et de regarder quelles sont les évolutions d’une zone inondable dans une ville donnée et de permettre de quantifier l’effet de tel ou tel ouvrage d’art sur le montant des dommages en cas de catastrophe naturelle. Cela a été fait à l’occasion des inondations de janvier 2018 où on a montré que la mise en jeu des barrages en amont sur la Seine avait permis de réduire le pic de crue de 65 cm. On estime 90 millions d’euros de dommages en moins. La prévention est rentable.

</strong>Contribuer au développement de la culture du risque<strong>

Bertrand Labilloy (CCR)

Les assureurs contribuent au développement de la culture du risque. Il y a beaucoup de communications, y compris en temps réel, dans les situations d’urgence où il y a un certain nombre d’assureurs qui ont mis en place des systèmes d’alerte où ils préviennent les assurés de l’imminence d’une catastrophe en leur indiquant la conduite à tenir. Cela permet d’éviter des dommages matériels mais surtout, cela permet d’éviter des pertes de vie humaine. On a tous en mémoire malheureusement les drames qu’ont connu l’Aude et la ville de Cannes il y a quelques années, où de nombreux citoyens ont perdu la vie suite à une catastrophe.

TABLE RONDE 1 : L’ADAPTATION DES TERRITOIRES POUR UNE SOCIÉTÉ RÉSILIENTE

 

Destinée à introduire le thème des assises, cette table ronde, animée par Mme Anette Burghof, a vu intervenir Mme Laure Tourjansky (cheffe du service des risques naturels et hydrauliques (SRNH) de la Direction générale de la prévention des risques (DGPR)) ; trois représentants de territoires à risques récemment impactés par des catastrophes : M Philippe Gustin (Préfet de Guadeloupe (cyclone Irma)), Mme Maryse Carrère (Sénatrice des Hautes-Pyrénées (crues du Gave de Pau)) et Noël Faucher (Maire de Noirmoutier (Xynthia)) ; ainsi que deux représentants du monde économique, M. Philippe Prudent (Medef, Président du Comité environnemental, membre du Conseil supérieur de prévention des risques technologiques, membre du Conseil national de la transition écologique) et M. Stéphane Pénet (Directeur des assurances dommages et responsabilités de la Fédération française des assurances).

Croisant les expériences de territoires ayant subi des catastrophes importantes avec celles d’acteurs économiques et de représentants des pouvoirs publics, cette table ronde a d’abord permis de souligner l’efficacité d’approches coopératives adaptées aux territoires et appeler à les renforcer pour y développer la culture du risque et y assurer la résilience des infrastructures et du bâti.

Le bilan positif des approches coopératives, PAPI et autres

La coopération est l’essence de la politique de prévention des risques naturels depuis la loi Barnier de 1982 (Mme Tourjansky). C’est l’esprit, du reste, la tenue régulière des ANRN dans la mise en œuvre de la politique les programmes comme les PAPI ou le Plan Séisme Antilles donnent le cadre d’un travail collectif, sur tous les axes de la prévention : connaissances, culture du risque, retour d’expérience, aménagement. Permettant d’associer et de responsabiliser tous les acteurs, y compris les citoyens.  La portée de ces programmes ont été reconnue ainsi que l’accélération des processus à la suite de catastrophe (Mme Carrère, M. Gustin et M. Faucher). Cependant, la mise en œuvre apparait trop longue et trop complexe (Mme Carrère, M. Faucher),

Le PAPI est un outil complet qui oblige à la réflexion car, préparer un PAPI, c’est définir une approche du développement durable des territoires permettant de réaliser plus facilement les projets internes au programme (Mme Tourjansky). Néanmoins les attentes sont fortes, que le PAPI soit mis en place rapidement, surtout si il fait suite à une catastrophe qui fait naître un sentiment d’urgence en conflit avec la réflexion nécessaire au développement durable.. Les PAPI mobilise environ 2 milliards d’euros, ils traduisent une véritable adhésion des élus locaux qui les ont portés : il faut souligner et saluer leur engagement. Le socle est solide, mais des ajustements sont nécessaires et la question du financement reste importante.

Cette conviction partagée d’efficacité de démarches partenariales a permis, dans la suite des échanges, de noter des points sur lesquels travailler dans une logique d’amélioration continue. Le besoin d’accompagnement des collectivités a été souligné ainsi que la nécessaire mobilisation des opérateurs de l’État pour ce soutien. Secrétaire de la Commission Mixte Inondation (CMI), la DGPR constate la dynamique des PAPI, qui ne peut qu’être entretenue. La question de la rapidité de concrétisation de ces programmes apparait maintenant comme une préoccupation. Les i témoignages de la table ronde conduisent à préciser le contenu d’un travail sur les PAPI appuyé sur un retour sur ceux qui ont le mieux « marché » d’une part et ceux qui « tardent » d’autre part.  Cela permettra de dégager des leviers d’action concrets pour accélérer la prévention inondation sur les territoires. 

Développer la culture du risque pour réduire la vulnérabilité des populations

L’ancienneté des événements et le renouvellement des populations conduisent au sentiment trompeur de « risque zéro », avec l’idée que l’Etat paiera toujours (M. Gustin, M. Faucher). Ceci s’est vu lors d’Irma, avec une population qui n’avait jamais vu de cyclone depuis plus de vingt-cinq ans. C’est pourquoi, il est toujours fondamental de développer la culture du risque.

Il faut faire comprendre à chacun qu’il est en responsabilité pour limiter les dommages et pour remettre le territoire en état de marche après une catastrophe Chacun peut devenir ensuite un passeur de témoignage pour développer la culture du risque.L’importance de l’éducation et la sensibilisation des publics passe aussi par une pédagogie adaptée, et ceci dès l’école (M. Gustin, M. Faucher).

Ainsi, en Guadeloupe, seront organisées en juin prochain des journées « à la japonaise » avec des exercices complétés par des échanges avec des experts, des techniciens, et l’ensemble des partenaires, incluant la population. Sur tout le territoire, doivent se tenir des exercices passés dans des plans communaux sauvegarde (PCS). Enfin, il faut aussi se demander quelle est la capacité de passer l’information aux citoyens avec les nouveaux outils de communication pour pouvoir alerter le plus rapidement possible sur la survenance d’un risque pour que chacun s’y prépare le mieux possible et que ne s’ajoute pas, à la crise, la panique et une réaction collective qui ne serait pas appropriée (M. Faucher).

De plus, il n’y a pas de bonne assurance sans bonne prévention (M. Penet) et les outils de prévention (PAPI, PCS, SLGRI, etc) seront d’autant plus efficaces qu’ils emportent l’adhésion de tous.  C’est pourquoi les assureurs proposent que, chaque année, soit organisé un dimanche de la prévention du risque naturel pendant lequel toutes les communes dotées d’un PCS simuleraient une crise, permettant ainsi de mieux connaître les gestes qui sauvent.

Ne pas ajouter la crise a la crise et travailler à la résilience des territoires

Les crises sont amplifiées par les dégâts faits aux infrastructures critiques et aux habitations : tous les intervenants se sont accordés sur la nécessité de progresser dans la résilience des territoires par l’application de règles d’urbanisme et de constructions adaptées, par l’assurance et par l’implication des acteurs économiques.

Ainsi, en Guadeloupe (M. Gustin), existe maintenant un programme de sécurisation des infrastructures critiques, pour tenir compte des enseignements d’Irma où l’absence d’électricité, d’eau, de telecom a ajouté la crise à la crise avec un enfouissement des réseaux. En outre, Irma a montré qu’il faut en premier lieu faire respecter les règles d’urbanisme et de construction.  Il reste à faire comprendre que 1 € investi dans la résilience permet de faire une économie de 7 € de dommages Aux Antilles des lieux sécurisés permettant de regrouper des populations quand survient une catastrophe apportent une première réponse priorisée

Il faut également travailler sur l’innovation (M. Faucher). A la suite de Xynthia, un concours d’architecture a été lancé en 2012 pour essayer d’adapter le geste architectural et faire en sorte que le bâtiment, lui aussi, remplisse une de ses fonctionnalités premières qui est d’assurer la sécurité de ses habitants sans dénaturer le paysage. Cela passe par la prise de conscience de chacun, de sa responsabilité et du risque que « son » bâtiment peut être amené à courir. Le PAPI de Noirmoutier consacre une part importante de ses actions à la protection contre la mer. Mais finalement, c’est la réglementation qui construit la culture du risque et non l’inverse !

L’assurance est un outil de résilience (M. Penet) et la France a la chance d’avoir un système d’indemnisation des catastrophes naturelles considéré comme un des plus efficaces en Europe et qui mérite d’être conforté. Il faut l’améliorer en Outre-Mer en renforçant la présence des assureurs face à une population dont la moitié n’est pas assurée. Il faut aussi améliorer le taux de couverture des exploitants agricoles, qui se protègent mal contre les risques climatiques, notamment la sécheresse.

Enfin (M. Prudent), l’action des acteurs économiques doit tendre à assurer la continuité économique du pays au travers de celle des activités d’importance vitale. Les autres entreprises doivent s’organiser pour éviter le sur-accident et l’arrêt prolongé, au risque de disparaître. C’est un travail à mener avec les pouvoirs publics pour mettre en place des outils de prévention qui soient cohérents entre eux. Au sein du MEDEF, un groupe a travaillé pour standardiser les méthodes de prévention des séismes. Enfin, on doit s’assurer que les installations tiendront lors d’une catastrophe en incluant un plan de continuité, un plan de fonctionnement dégradé et des exercices de simulation dans les programmes de modernisation à réviser régulièrement.

S’adapter à la géographie des territoires

La GEMAPI donne de nouvelles compétences aux collectivités, qui n’ont pas toutes les connaissances, les outils et les moyens humains de la mettre en œuvre. C’est pourquoi elles ont besoin d’un soutien de l’État (Mme Carrère, M. Faucher) adapté aux territoires.

Dans la vallée du Gave de Pau, le PAPI fournit des outils qui bénéficient aux petites communes. A Noirmoutier, il soutient en particulier la défense contre la mer. Chaque territoire ayant sa spécificité, sa culture, son histoire, la géographie (plaine, montagne, littoral) doit être un élément déterminant dans la définition du périmètre des action de prévention des inondations. La communauté de risque (M. Faucher) n’est pas forcément la communauté de bassin ou de vie, parce qu’on peut arriver à transférer des fonctionnalités d’un territoire exposé vers un territoire qui l’est un peu moins, ce qui aura une incidence financière.

Il faut maintenant laisser aux collectivités le temps de s’organiser (Mme Carrère) La question du financement reste un vrai problème (M. Faucher). Celui-ci doit être fléché et adapté au territoire, pour développer la culture du risque, en travaillant en confiance, selon un strict principe de subsidiarité. En outre, si l’Etat co-finance la définition des programmes d’action, il faut aussi qu’il soit présent dans la partie opérationnelle (Mme Carrère). En la matière, la solidarité nationale joue au travers du fonds Barnier qui doit rester … à la prévention des risques, mais il faut sans doute débattre d’autres sources de financement. La loi Fesneau contribue à faciliter la mise en œuvre de la GEMAPI et la loi de finance pour 2019 modifie un peu le fonds Barnier pour donner plus de poids à la réduction de la vulnérabilité du bâti. Les territoires soumis au risque d’inondation doivent vraiment prendre en main leur destin et trouver les moyens adaptés en lien avec les services de l’État.

RESTITUTION DES ATELIERS

Introduction, par M. Pascal Berteaud, Directeur Général du CEREMA

Beaucoup de progrès ont été réalisés depuis quinze ans en matière de conscience et de connaissance des aléas et de leur prévision. L’ensemble des acteurs a contribué à ces progrès. Aujourd’hui, nous avons une vision assez claire des risques auxquels est exposée la population.

Pendant longtemps, les risques ont été traités de façon séparée du reste de l’aménagement. Aujourd’hui, l‘approche partenariale, à la fois entre les différents acteurs et entre les différentes thématiques de l’aménagement du territoire, est entrée dans les mœurs. Cela a commencé avec la mise en place des PAPI. Aujourd’hui, plus personne n’imagine traiter simplement le problème ponctuel d’une inondation, mais on le traite sur l’ensemble d’un bassin versant. C‘est le cas aussi avec l‘apport de la GEMAPI où l‘on voit que la gestion des risques doit se faire de façon globale.

Aujourd’hui, on a la connaissance, le socle idéologique et les outils pour traiter l’ensemble des risques naturels, ce qui rend très optimiste pour les quinze prochaines années dans la perspective de l‘amélioration de leur prise en compte dans l’aménagement.

Les inondations meurtrières de ces dernières années en France, au-delà des questions d’alerte, de gestion de crise, sont venues réinterroger plus fondamentalement l’urbanisation et l’occupation des territoires soumis aux risques. Dès lors, il s’agit de réduire durablement la vulnérabilité des personnes et des territoires qui restent et resteront soumis aux risques. Les outils de la prévention, la prise en compte des risques dans les documents d’urbanisme, et la réglementation demeurent essentiels pour y parvenir. Force est de constater que l’action des professionnels et des collectivités est indispensable pour répondre à l’intégration des risques dans l’aménagement du territoire.

Atelier 1 : synergies aménagement et GEMAPI

Pourquoi avoir choisi de débattre sur le thème de votre atelier ?

La GEMAPI est arrivée sur les territoires avec précipitation, et on observe une prise compétences dans les territoires mais pas encore véritablement la définition de ce qui va se faire dans ce domaine. Cette approche nouvelle de recherche de synergies entre la prise en compte des milieux aquatiques et la prévention des inondations dans le cadre de l’aménagement du territoire n’est pas stabilisée mais on est en chemin, sachant que l’articulation de la GEMAPI et de l’aménagement du territoire est un sujet complexe. Le contexte de réforme de la décentralisation complexifie de plus la démarche. Il existe de nombreux outils mais il est nécessaire de les mettre en application.

Si on devait résumer ou définir en un mot la tendance des pratiques actuelles dans le domaine de votre atelier, quel serait-il et pourquoi ?

  • La complexité des politiques publiques qui sont menées et le fait que bien souvent des activités fonctionnent par silo, en parallèle ne permet pas toujours une appropriation commune, collective de ce qui se construit et de ce qui se fait dans chaque domaine.
  • Le manque de connaissance et de partage : Il est important de faire en sorte que tout le monde ait la bonne connaissance de l’évènement climatique, de la façon dont il va se produire, de la façon dont il faut préparer et que tous soient au même niveau d’informations sinon les réponses fournies pourront ne pas être adaptées. Aujourd‘hui, dans les territoires, il y a d‘un côté beaucoup de connaissances dispersées et d‘un autre côté le citoyen qui a besoin de comprendre. Nous avons donc besoin d’une banque de données où ces connaissances puissent être stockées et synthétisées. Pour construire une stratégie et une solidarité entre territoires, il est extrêmement important que l’on puisse aller jusqu’à la vulgarisation par la pédagogie à tous les niveaux (élus, usagers, riverains, jeunes…) afin que tout le monde puisse avoir les moyens d’acquérir cette connaissance de base.
  • La GEMAPI est une nouvelle compétence avec de nouveaux acteurs qui entrent dans la coordination. Par exemple, les EPCI à fiscalité propre étaient plus ou moins parties prenantes en appartenant à des EPTB, à des syndicats mixtes mais étaient globalement des syndicats dédiés, ce qui pose également des problèmes de financements (accès et équilibre).

Quels sont les enjeux essentiels, actuels et à venir, qui ont été définis par les participants sur la thématique ? Quels sont les points clés de changement et de réussite identifiés ? Et quels sont les principaux outils et solutions pour chacun des grands enjeux qui concernent votre atelier ?

  • Mieux connaître le risque sur chacun des territoires concernés via un meilleur partage d’information et de connaissance mais aussi via un diagnostic de terrain.
  • Travailler sur les réponses à apporter aux territoires, avec quels outils, dans quelles conditions. Il y a eu un débat pour savoir comment les outils existants pouvaient être utilisés.
  • Ne pas rajouter davantage d’outils sachant qu’ils sont déjà nombreux (PLU(i), SCoT, SRADDET…versus PPRN, SLGRI, PGRI) et complexes.
  • Il est essentiel de se mettre d’accord à partir d’un diagnostic sur une stratégie concernant les territoires que l’on veut aménager, de façon à l’élaborer avec les habitants, les élus et les acteurs de terrain, et de s’approprier les connaissances existantes.
  • Forte demande d’un accompagnement de services de l’Etat pour les territoires ruraux et les plus petites communes qui n’ont pas toujours les moyens (humains et financiers) d’utiliser ou de mettre en place ces outils.
  • Penser à la phase de gestion de crise et à la phase de retour à la normale en parallèle.

Enfin, quelles sont les mesures qui ont été identifiées comme prioritaires ou urgentes à appliquer ?

Il est nécessaire d’avoir de la cohérence, mettre en place des gouvernances adaptées aux territoires, que les schémas ne soient pas seulement compatibles les uns avec les autres mais qu’ils aillent plus loin pour les rendre vivants et adaptés aux territoires.

Atelier 2 : vulnérabilité et résilience des bâtiments

Pourquoi avoir choisi de débattre sur le thème de votre atelier ?

Le bâtiment est le lieu où chacun vit pendant environ 80%-90% de son temps. Le premier rôle d’un bâtiment est de protéger de tous les agressions extérieures, et, entre autres des événements naturels (la pluie, le vent, le froid…).

Si on devait résumer ou définir en un mot la tendance des pratiques actuelles dans le domaine de votre atelier, quel serait-il et pourquoi ?

Il faut arrêter de travailler en silo dans le domaine du bâtiment avec les spécialistes du sismique, les spécialistes de l’inondation, les spécialistes des avalanches… avec peu de transversalité entre chacun.

Ce n’est pas la même temporalité quand on investit dans le bâtiment, avec une vision à court terme, et des budgets limités alors que le bâtiment est là pour 50 ou 100 ans.

Quels sont les constats, les difficultés ou les obstacles qui ont été exprimés au cours de l’atelier pour la thématique donnée ?

Les règles sont souvent méconnues, elles sont complexes, multiples et parfois contradictoires parce qu’il y a des règles vis à vis des séismes, des incendies, de l’efficacité énergétique… tous ce corpus de règlementation doit être cohérent.

La notion de coût global, ou l’on choisit le moins disant au lieu de prendre le mieux disant et surtout celui qui va permettre de moins dépenser dans la durée de vie du bâtiment.

Quels sont les enjeux essentiels, actuels et à venir, qui ont été définis par les participants sur la thématique ? Quels sont les points clés de changement et de réussite identifiés ?

L’enjeu essentiel est que le bâtiment protège l’humain. Les freins par rapport à cet enjeu sont par exemple :

  • Le fait qu’il y a de très bons généralistes pour la construction de maisons individuelles mais peu de spécialistes des risques naturels sur ce sujet,
  • Le fort problème de l’auto-construction en Outre-Mer
  • La rénovation, qui est plus de la moitié de l’activité du bâtiment dans des secteurs sensibles aux risques naturels

En synthèse, quels sont les principaux outils et solutions pour chacun des grands enjeux qui concernent votre atelier ?

  • Développer la culture du risque et si possible pas de façon anxiogène ;

Le besoin d’une cartographie hiérarchisée en fonction de la gravité et de la fréquence ;

Des incitations foncières (pour les questions urbaines), financières (avec les prêts bancaires), assurantielles (pour valoriser la prise en compte des risques), ou au moment de la transaction immobilière ;

Développer l’obligation de résultat dans ce domaine qui favorise les résultats et l’innovation

Enfin, quelles sont les mesures qui ont été identifiées comme prioritaires ou urgentes à appliquer ?

Il est indispensable d’améliorer la culture du risque au niveau de l’ensemble de la population, de bien sensibiliser et former les professionnels dès la formation initiale (ingénieur, architecte…), et de rendre les règles intelligibles, et compréhensibles.

Atelier 3 : se préparer à la gestion du post-événement

Pourquoi avoir choisi de débattre sur le thème de votre atelier ?

Les évènements récents (Inondations de la Seine en 2016 et 2018, Inondations de l’Aude en 2018, cyclone Irma à Saint Martin en 2017…) qui ont provoqué de forts dommages, ont encore montré l’importance pour tous de coordonner l’après crise.

A l’échelle internationale, le sujet a été notamment mis en avant par l’ONU dans le cadre d’action de Sendai de 2015 sous la notion de Build Back Better (BBB) qui s’applique de façon transversale à la phase de post évènement pour que les conséquences soient moins dommageables.

Si on devait résumer ou définir en un mot la tendance des pratiques actuelles dans le domaine de votre atelier, quel serait-il et pourquoi ?

Les acteurs reconnaissent tous le besoin d’anticipation de la phase de post crise et le besoin d’accompagnement et de solidarité entre les acteurs et entre les territoires. C’est pourquoi, afin de couvrir au mieux divers aspects techniques du post évènement, l’atelier s’est articulé autour de six thèmes : diagnostic d’urgence, gestion des déchets, impacts sanitaires et psychosociaux, reconstruction, retour d’expérience, solidarité des territoires).

Quels sont les constats, les difficultés ou les obstacles qui ont été exprimés au cours de l’atelier pour la thématique donnée ?

L’absence de culture du risque sur un territoire qui n’a pas vécu de catastrophe récente, et la perte de la mémoire des catastrophes passées malgré leur récurrence d’une génération à une autre.

La phase de post crise est dans la continuité de la gestion de crise mais ne s’enclenche pas toujours automatiquement pour satisfaire tous les besoins car elle nécessite la mobilisation de nouveaux moyens humains, de nouvelles compétences, voire de nouvelles solidarités.

Un plan post crise (type plan ORSEC) pourrait être utile pour s’organiser et identifier les acteurs qui interviennent une fois la phase de crise passée et pour aller de façon efficiente et coordonnée jusqu’au bout de la reconstruction, qui est une composante essentielle de la prévention.

En synthèse, quels sont les principaux outils et solutions pour chacun des grands enjeux qui concernent votre atelier ?

Capitaliser les bonnes pratiques, y compris les mesures prises après la crise, avec une volonté de disposer d’une plateforme d’échange et d’information multirisques sur les différents retours d’expériences réalisés selon une méthodologie harmonisée;

Disposer d‘une planification et d‘outils spécifiques pour le post événement prenant en compte une échelle à court terme d’après crise avec les travaux d’urgence (déblaiement, premières réparations avec premiers expertises), et une échelle à plus long terme (temps de la reconstruction).

Disposer d‘une cellule spécialisée et multi acteurs de gestion post évènement pour la coordination, le contact avec le public et les acteurs

Disposer de fiches d’analyse de vulnérabilité du territoire afin de pouvoir anticiper les risques et savoir qui contacter et qui intervient dans la phase du post évènement.

Enfin, quelles sont les mesures qui ont été identifiées comme prioritaires ou urgentes à appliquer ?

Connaitre le plus rapidement possible les problématiques pouvant survenir suite à une catastrophe pour pouvoir anticiper et identifier les échelles d’intervention (géographiques, de solidarité, d‘accompagnement ou de mise en œuvre).

Atelier 4 : tourisme et risques

Pourquoi avoir choisi de débattre sur le thème de votre atelier ?

C’est un sujet qui intéresse des personnes provenant de différents environs tels que les services de l’Etat, les assureurs, les associations, le secteur privé…

L’attractivité et les risques sont 2 termes qui paraissent antinomiques, mais les échanges de l’après-midi ont montré que les divers acteurs présents se sont accordés sur l’intérêt et l’importance de concilier ces 2 domaines.

Si on devait résumer ou définir en 1 mot la tendance des pratiques actuelles dans le domaine de votre atelier, quel serait-il et pourquoi ?

Les risques naturels ne condamnent pas un territoire mais peuvent être un levier de développement, une forte envie d’innovation pour s’y adapter.

Nous sommes conscients que la tendance n’est pas d’aller contre des phénomènes, mais plutôt d’essayer autant que possible de s’adapter et de trouver des solutions aux réalités des risques. Il fut un temps où l’on pensait que les ouvrages érigés pouvaient nous protéger, mais on a compris à travers un certain nombre d’expériences et d’évènements que ces ouvrages pouvaient aussi accélérer les processus (ex : érosion côtière) et faire en sorte que le développement économique ne soit pas entravé par les problématiques de risques naturels.

Quels sont les constats, les difficultés ou les obstacles qui ont été exprimés au cours de l’atelier pour la thématique donnée ?

La question de la règlementation et de son adaptation à la réalité est revenue souvent, d’où la nécessité d’une différenciation avec des sites qui ont leurs caractéristiques et auquel le caractère général de la loi n’est pas toujours adapté à la situation.

Il y a aussi le problème de la communication de type interne ente les acteurs eux-mêmes, comment communiquer par rapport aux connaissances de plus en plus pointues que l’on acquiert et comment partager ces savoirs et ces diagnostics.

La question du diagnostic pose aussi la question de la confiance, comment les résidents, les touristes, les acteurs peuvent faire confiance à ces diagnostics qui ont été réalisés.

La culture du risque doit être partagée dans sa construction et dans son élaboration avec la population.

Quels sont les enjeux essentiels, actuels et à venir, qui ont été définis par les participants sur la thématique ? Quels sont les points clés de changement et de réussite identifiés ?

On est face à une réalité de changement climatique. Mais cette réalité peut être un catalyseur, un mobilisateur des acteurs. Les enjeux sont la nécessité d’innover, d’expérimenter pour trouver les moyens de s’adapter aux réalités de terrain.

En synthèse, quels sont les principaux outils et solutions pour chacun des grands enjeux qui concernent votre atelier ?

A travers l’expérimentation, les outils peuvent être de l’ordre de l’éducation des enfants, de la signalétique (avoir les traductions nécessaires pour une population de touristes étrangers), et comment adapter les outils existants comme les PCS (Plans Communaux de Sauvegarde) ou les DICRIM (Document d’Information Communal sur les Risques Majeurs) à la réalité touristique.

Il faut sortir aussi un peu de cette réalité anxiogène des risques, et travailler sur le « comment » aborder la question des risques sur un autre registre puisqu’il s’agit aussi d’attractivité, pour développer une certaine culture autour des fleuves, des rivières, de la mer et ainsi concilier la dynamique économique et touristique avec les risques existants des territoires.

Enfin, quelles sont les mesures qui ont été identifiées comme prioritaires ou urgentes à appliquer ?

L’urgence est comment innover, expérimenter ou essaimer de manière à avoir une règlementation adaptée a des réalités différentes.

Atelier 5 : rôle des nouvelles technologies

Pourquoi avoir choisi de débattre sur le thème de votre atelier ?

Le numérique s’est invité dans nos vies, dans nos métiers, et aujourd’hui il existe une palette de solutions possibles et il serait important de faire le tri et de prioriser.

Les réseaux sociaux, sont aussi très présents dans la gestion des risques. Ils sont de formidables vecteurs de communication, de transmission d’information dans une situation d’urgence mais cela peut aussi malheureusement transmettre de mauvaises informations ou de mauvaises consignes, donc comment faire et utiliser ces réseaux sociaux.

Comment faire et inventer les technologies pour que cela se passe au mieux et que la gestion des risques soit optimale.

Si on devait résumer ou définir en 1 mot la tendance des pratiques actuelles dans le domaine de votre atelier, quel serait-il et pourquoi ?

Ce qu’on peut constater c’est qu’il n’y a pas de freins aux technologies, tout est à notre disposition et il suffit de s’en emparer. Les freins seraient de savoir comment intégrer ces nouvelles technologies dans nos organisations, institutions, pour faire en sorte que le citoyen s’en empare également parce que si l’usage ne se prescrit pas, il peut se construire. Faisons-en sorte de voir ce qu’utilise le citoyen et prenons les mêmes technologies pour passer les bons messages.

Quels sont les constats, les difficultés ou les obstacles qui ont été exprimés au cours de l’atelier pour la thématique donnée ?

Une des difficultés qui a été relevé est le manque de partage de la donnée. Les données aujourd’hui sont segmentées. Elle doit être évidemment protégée car elle contient parfois des données personnelles, mais pour autant il est important aussi de les décloisonner, de les structurer, et de les partager de façon fiable.

Quels sont les enjeux essentiels, actuels et à venir, qui ont été définis par les participants sur la thématique ? Quels sont les points clés de changement et de réussite identifiés ?

Il est important de parler :

  • des GAFA et de la gouvernance de la donnée,
  • de l’interopérabilité entre tous les dispositifs.
  • de ce haut niveau de résilience que l’on va devoir amener pour garantir que tout ce que l’on va inventer fonctionnera lorsqu’on sera en mode dégradé
  • mais aussi de cette notion d’agilité, car ce qui est vrai aujourd’hui, ne le sera pas demain, et ne le sera pas pour les Jeux Olympiques 2024. Comment faire des dispositifs agiles qui arriveront à évoluer avec les révolutions numériques qui vont se succéder.

Il ne faut pas oublier non plus, que le numérique n’est pas accessible à tout le monde (personnes âgées, population précaires…), donc il ne faut pas tout attendre du numérique. Un des enjeux est de rendre le numérique accessible à tous mais il faut que nous sachions aussi prendre le relais avec des systèmes simples, et robustes qui peuvent se passer un temps du numérique pour répondre à de nouvelles situations de crise.

En synthèse, quels sont les principaux outils et solutions pour chacun des grands enjeux qui concernent votre atelier ?

Les solutions et les outils sont disponibles. La quasi-majorité des personnes possèdent un téléphone portable aujourd’hui.

L’internet des objets, les montres et appareils connectés cohabitent de plus en plus avec notre quotidien.

Beaucoup de discussions ont eu lieu pendant l’atelier sur les applications existantes, et en conclusion, il n’y a pas une seule application qui pourra tout dire ou faire et il est nécessaire d’avoir plusieurs applications, certaines pour des acteurs impliqués dans la crise, d’autres pour des personnes plus passives.

Il est nécessaire que les applications soient simples, fiables, robustes, durable dans le temps.

Il faut s’appuyer sur les lacunes des GAFA et utiliser les solutions locales, proches du citoyen et des enjeux, qui sont aussi mises en œuvre dans différents territoires.

Enfin, quelles sont les mesures qui ont été identifiées comme prioritaires ou urgentes à appliquer ?

La priorité serait d’identifier les pratiques de la population, et d’amener un peu de sciences souples dans cette espace de sciences dures, pour pouvoir s’en rapprocher au plus près. Car une application pour qu’elle fonctionne doit être téléchargée par les usagers.

On a imaginé une labellisation des applications, avoir un label de sécurité citoyenne, pour arriver à faire la différence avec les applications qui diffusent un message fiable et d‘autres applications qui véhiculent des messages qui ne sont pas issus de la sécurité civile.

Atelier 6 : rôle des acteurs économiques

 

Pourquoi avoir choisi de débattre sur le thème de votre atelier ?

Le coût des catastrophes naturelles en France, plus de 48 milliards d’euros, en 2013, avec pour les inondations un coût de 16 milliards d’euros dont 8 milliards pour les particuliers et 8 milliards pour les entreprises. Il était important pour nous de nous concentrer sur le risque en entreprise lors de cet atelier.

Si on devait résumer ou définir en 1 mot la tendance des pratiques actuelles dans le domaine de votre atelier, quel serait-il et pourquoi ?

Le constat est la faible culture du risque via un manque de connaissances, à la fois de l’exposition aux risques par le chef d’entreprise, de mesures préventives à adopter et de l’estimation des conséquences dommageables pour la structure.

Quels sont les constats, les difficultés ou les obstacles qui ont été exprimés au cours de l’atelier pour la thématique donnée ?

La multiplicité des outils, parfois non homogènes et souvent pas assez pédagogiques. Il est donc nécessaire de les simplifier et de les vulgariser;

L’absence de plan de continuité d’activités pour bon nombre d’entreprises;

Un langage sur les risques inadapté aux chefs d’entreprises (anxiogène, pas assez positif) et non segmenté en fonction de la taille de l’entreprise. Les besoins d’une PME ne sont pas les mêmes qu’un grand groupe.

Un manque d’accès à l’information, de connaissance de la réglementation et de formation et d’éducation aux risques.

Une absence de leviers financiers pour convaincre de la nécessité de mettre en place des mesures préventives et convaincre que la prévention coûte moins chère que la réparation.

Un défaut d’aide psychologique pour un retour accéléré à la reprise d’activité.

Quels sont les enjeux essentiels, actuels et à venir, qui ont été définis par les participants sur la thématique ? Quels sont les points clés de changement et de réussite identifiés ?

Un des premiers enjeux serait l’accompagnement du fait de la pluralité d’acteurs et de moyens. Mais il a aussi été proposé de :

Mobiliser le monde étudiant pour initier des diagnostics en « série », et des campagnes de sensibilisation de masse

Proposer un guichet unique des risques naturels du territoire auprès duquel les acteurs économiques trouveraient des informations

Organiser une journée du risque

Il y a un besoin de connaissance et de formation, mais il est aussi nécessaire de rendre efficiente les données collectées et diffusées. Il faut en effet hiérarchiser l’information, la rationaliser et permettre un usage de ces informations par les acteurs économiques et notamment l’identification de leur dépendance.

L’entreprise doit prendre a sa charge un  des actions (en tant qu’entreprise acteur) comme par exemple réaliser les PCA, le document unique, une communication interne vis a vis de ces salariés (en tant que citoyen), et favoriser les auto diagnostics. Il est de plus nécessaire d‘intégrer les acteurs privés en amont dans la phase d’élaboration des PAPI, développer les PPMS pour les entreprises et intégrer les notions de Build Back Better dans la construction des bâtiments.

En synthèse, quels sont les principaux outils et solutions pour chacun des grands enjeux qui concernent votre atelier ?

Quatre des enjeux clés sont :

Connaitre son exposition en structurant et en organisant la donnée

  • Améliorer la résilience via la réalisation des PCA
  • Accéder à l’information en centralisant celles-ci au sein d’un seul outil et d’une plateforme unique
  • Développer la culture du risque par l’enseignement, le partage de connaissance entre pairs et la mise en place d’exercices pratiques (PPMS)

De plus, des points majeurs ont été discutés avec notamment le fait de :

  • Travailler sur des éléments de langage (utiliser des messages chocs, s’adapter aux formulations du monde économique de l’industriel) et des outils numériques (type simulation d’évènement) et réaliser des sensibilisations (dépendance par rapport aux grèves, politiques de maitrise énergétique…);

Faire évoluer la réglementation et se servir du diagnostic comme un élément nécessaire à toute transmission et mutation d’un bien économique, identifier une profession de diagnostiqueur, jouer sur un volet plus sociétal (notamment au regard des salariés en anticipant les phénomènes prévisibles en proposant du télétravail);

Promouvoir la solidarité avec nombreuses idées sur la mutualisation des stocks, des zones de replis, la sécurisation et le portage des données numériques à l’échelle soit d’un quartier soit de domaines professionnels ou de corps de métiers.

Enfin, quelles sont les mesures qui ont été identifiées comme prioritaires ou urgentes à appliquer ?

La mesure de financements ressort, avec une approche soit incitative (avec un crédit d’impôt prévention), soit coercitive. Cela pourrait être conjugué à d’autres éléments incitatifs comme par exemple, un système de bonus / malus assurantiel qui permettrait de pérenniser les actions mises en place, voire une mise en veille des prêts bancaires des acteurs économiques en phase post crue.

Introduction de Pascalt BERTEAUD Restitution atelier 1
Restitution atelier 3 Restitution atelier 6

CONCLUSION

Pascal Berteaud note que c’est le partage de la connaissance qui est la principale demande, ce qui nécessite de développer la vulgarisation sur la question des risques ! Il y a aussi la question de la mise en commun des REX, ce qui amène à développer des plateformes de partage. Les acteurs de l’Etat doivent se mobiliser sur ces sujets. La mobilisation d’experts en cas de crise est enthousiasmante pour les opérateurs !Il mentionne la création prochaine de l’Agence Nationale de cohésion territoriale et l’appel d’offres du CEREMA sur les territoires en mutation.

TABLE RONDE 2 : IMPLICATION DE TOUS LES ACTEURS DE LA PREVENTION DES RISQUES NATURELS

La seconde table ronde a présenté les témoignages de la place, du rôle et des responsabilités de différents acteurs dans le champ de la prévention. Ont donc échangés leurs points de vue : Laurent Bresson (directeur départemental des territoires et de la mer de la Seine-Maritime, sur la nécessité d’une participation élargie à la prévention des risques), Philippe Bauchet (conseil régional Occitanie, sur l’intégration de la prévention des risques dans les schémas régionaux d’aménagement), Thierry Gonzalez (directeur adjoint du département trois océans de l’Agence française de développement (AFD), sur le financement de la politique de prévention des risques en outre-mer), Eric Daniel-Lacombe (architecte, et Jeanny Lorgeoux, maire de Romorantin, sur l’aménagement d’un quartier de cette ville), et Philippe Estingoy (directeur général de l’Agence qualité construction (AQC), sur la coordination des acteurs de la prévention dans le bâtiment).

Participation élargie à la prévention des risques

Laurent Bresson, DDTM de la Seine Maritime met en relief le changement de posture de l’État, qui permet de développer une participation élargie à la prévention des risques. En effet, les outils tels que les PAPI/SLGRI/PPRI vont dans le sens de la participation. Les services de l’État, DDT et DDTM ont ainsi pour vocation d’intégrer l’ensemble des politiques dans des démarches conjointes. L’État s’attache donc à créer les conditions pour qu’émergent sur les territoires des démarches de projet ambitieuses et vertueuses, mettant en arrière les aspects réglementaires et mobilisant l’ensemble des acteurs. C’est le meilleur moyen de diffuser le plus largement la culture du risque et l’intérêt de tous est de participer car la problématique du risque est totalement inséparable des autres problématiques des territoires.

Cette participation élargie se développe avec des démarches intégrées autour de projets de territoires, notamment les territoires à risques où existent déjà des activités humaines et de l’urbanisation. Pour ceux-ci, la question est de savoir comment organiser leur transformation pour les rendre moins vulnérables., et cette transformation impose une approche très intégrée.

Il cite donc le cas de l’élaboration du PPRL de Dieppe. Dans ce territoire, il y a un projet de ZAC exposé au risque de submersion marine et qui le sera encore plus dans une centaine d’années. Face à ce problème, on peut, soit ne pas autoriser grand-chose face au niveau de risque anticipé, soit bâtir un projet vertueux permettant le renouvellement des quartiers urbains vulnérables, grâce à un accompagnement réglementaire. C’est cette dernière logique qui a été choisie.

C’est bien à une accélération de l’accompagnement et de la prise en compte du risque que nous assistons aujourd’hui. L’enjeu majeur est donc de pouvoir mobiliser l’ensemble des acteurs compétents aux différents échelons de planification territoriale, pour qu’une stratégie d’ensemble se développe à toutes les échelles du territoire.

Intégration de la prévention et la gestion des risques dans les schemas régionaux d’aménagement

Philippe Bauchet, du Conseil régional d’Occitanie, rappelle que l’aménagement du territoire est une compétence des régions. Pour illustrer son propos, il prend l’exemple du Schéma régional d’aménagement, de développement et d’égalité des territoires (SRADDET) baptisé Occitanie 2040.

L’objectif d’Occitanie 2040 est une stratégie d’aménagement partagée et fédératrice entre l’ensemble des acteurs, l’un des enjeux étant de créer l’identité de cette nouvelle région. Mais Occitanie 2040 doit aussi être un outil rapidement opérationnel avec des règles du jeu en nombre limité et des dispositifs développés par la région qui soit appropriables par tous les territoires. Cette démarche sera menée avec une concertation la plus large possible avec l’ensemble des parties prenantes des territoires. Elle inclura également la formation des citoyens sur ce qu’est un schéma d’aménagement et comment ils peuvent y contribuer.

C’est à partir de cette base qu’Occitanie 2040 se propose de relever trois défis verticaux et un défi transversal.

Les défis verticaux sont : i) l’attractivité du territoire ; ii) une coopération territoriale basée sur une véritable réciprocité entre territoires et non sur une logique de métropoles entraînant le reste ; iii) le rayonnement régional, pour avoir une place dans le contexte international du pourtour méditerranéen.

Le défi transversal d’Occitanie 2040 est l’adaptation au changement climatique, car l’Occitanie est exposée à de nombreux risques. Fondamentalement, le SRADDET est un rapport d’objectifs basé sur une vision partagée des défis à surmonter pour avoir une vision de la région en 2040 : quel développement économique, comment accueillir la population, comment donner un avenir aux jeunes ? C’est dans ce sens que l’intégration des risques et de l’adaptation au changement climatique dans le SRADDET, qui est une référence pour les plans d’urbanisme, prend tous son sens.

Nous souhaitons donc avoir une vision commune issue d’un partage maximal avec l’ensemble des territoires et des citoyens sur quels sont les risques, aujourd’hui, mais aussi demain, au regard du changement climatique. Cette vision commune permettra aux décideurs locaux, responsables de SCOT ou de PLU de traduire des règles de prévention sur leur territoire. Ici, le rôle de la Région, est d’accompagner les territoires.

Financement de la politique de gestion des risques en outre-mer par l’AFD

Thierry Gonzales précise d’entrée que l’Agence française de développement (AFD) intervient uniquement dans les départements et collectivités d’Outre-Mer, qui correspondent à peu près à 15 à 20 % de l’activité de l’Agence, qui travaille surtout à l’étranger.

Si les outre-mers ne rassemblent que trois millions d’habitant, ils concentrent tout ce qui peur être rencontré en matière de risques naturels : séismes, volcanisme, cyclones, submersion, inondations…  avec, en toile de fond le changement climatique avec le défi de l’adaptation. C’est pourquoi, les catastrophes naturelles sont enracinées dans le quotidien de populations qui, finalement sont assez bien préparées pour y faire face.

L’AFD intervient en Outre-Mer en finançant des projets d’établissement publics locaux, notamment de santé mais elles soutient aussi le secteur privé, notamment dans les secteurs du tourisme et de l’aménagement urbain. Elle intervient enfin au travers des budgets d’investissement des collectivités locales.

Chaque année, ceci représente environ 1,5 milliards d’euros de prêts accordés selon la soutenabilité financière des projets, mais aussi, du respect des principes du développement durable. L’instruction des projets inclut donc des critères de développement durable et un avis sur le sujet est formulé par une entité indépendante du département de l’Agence qui instruit le dossier. Il n’est donc pas rare de voir un projet soutenable financièrement écarté parce qu’il présente des fragilités au regard de la vulnérabilité du territoire.

Lorsque l’AFD est sollicitée, elle organise un dialogue avec les porteurs du projet pour en identifier les faiblesses et accompagner son bouclage. En outre, le Ministère des Outre-Mer peut financer les études et l’assistance à maîtrise d’ouvrage. Ainsi, les conditions de prêts sont différenciées en fonction de la valeur ajoutée du point de vue du changement climatique. Depuis 2017, il y a un prêt à taux zéro, soutenu par le Ministère, qui permet de récompenser les projets les plus vertueux en la matière.

L’AFD intervient aussi sur le registre régional en incluant à la fois des territoires français et des Etats étrangers voisins, soumis à des risques naturels qui ignorent les frontières, notamment dans les régions insulaires. Elle finance des projets de prévention des catastrophes naturelles qui sont le plus souvent portés par de institutions comme la Commission de l’Océan Indien (COI) et la Commission du Pacifique Sud (CPPS), mais aussi à de grandes ONG comme la Croix Rouge, pour des plateformes d’intervention régionale. Ce sont des projets très intéressants car ils mobilisent des Etats autour de la prévention des risques et aident ceux-ci en matière de gouvernance. Ils aident aussi à faire face aux catastrophes par un appui opérationnel et des entrepôts disséminés dans la région considérée (Océan Indien, Pacifique, Caraïbes).

Intégration du risque inondation dans la réamenagement d’un quartier

M. Jeanny Lorgeoux, Maire de Romorantin-Lanthenay, raconte l’histoire de la disparition en 2005, de l’usine Matra Automobiles. Ce fut un tsunami social mais, un terrain a été libéré, que la ville s’est attachée à aménager après l’avoir dépollué. Il s’est donc associé avec l’architecte Eric-Daniel Lacombe pour imaginer un quartier nouveau intégré dans une zone inondable du PPRI. Ce fut un long processus de concertation aboutissant à l’entente de tous pour la reconstruction des six hectares selon un nouveau paradigme. Ce fut un succès : deux mois après la fin des travaux, le quartier reconstruit a résisté à une inondation épouvantable, alors que le quartier historique de la ville a dû être évacué !

Eric-Daniel Lacombe précise que le PPRI a été réalisé autour de zones sèches et de zones mouillées. Sur le terrain, on ne devait pas dépasser 20 % d’emprise, les bâtiments seraient sur pilotis avec des bassins de rétention pour que le quartier évoque la hauteur d’eau avec l’idée qu’elle arriverait. Personne ne croyait que l’eau reviendrait à 1,5m sur ce quartier, et c’est pourtant ce qui est arrivé ! L’un des côtés du quartier est rectiligne, en lien avec la ville, l’autre est courbe, pour accompagner l’écoulement des eaux, afin que chacun puisse repérer le sens du courant. L’architecture a été incitatrice : chacun sait où est sa rampe, où sont les différentes cotes d’inondation. Cette architecture est suffisamment abritante pour être en sécurité et suffisamment ouverte pour pouvoir se transformer.

L’État nous a remis un prix… et deux mois plus tard, il a mis 1,45m d’eau dans le quartier, pour contrôler ! La crue a permis de vérifier que l’eau est sortie du quartier en moins de quarante-huit heures. Ailleurs, certains habitants avaient perdu leur maison ! Le Maire a relancé un concours pour reconstruire une MJC selon les mêmes principes que le quartier, pour pouvoir fonctionner en cas d’inondation. Si l’esthétique peut jouer un rôle en donnant des repères à chaque habitant, il n’en reste pas moins que rénover en innovant est beaucoup plus compliqué !

Coordination des acteurs de la prévention dans le bâtiment

Selon M. Philippe Estingoy, l’Agence Qualité Construction (AQC) a la seule vocation de prévenir les pathologies du bâtiment. C’est pourquoi elle se préoccupe du building back better et surtout du building before better.

En matière de construction, il n’y a pas de difficulté de dialogue entre les techniciens. Si, une fois la cartographie des événements dangereux réalisée, on réunit des techniciens de la construction et des aménageurs, tous diront la même chose. Non, le problème est entre la connaissance scientifique et la vie dans les territoires.

Ainsi, à Rive-de-Gier, des repères de crues avaient été posés et, un an après, AQC a fait une simulation de la crue à partir de ces repères, et les habitants et les élus ont dit que ça ne s’était pas passé comme ça, certains disant qu’avec la nouvelle carte, le foncier ne vaudrait plus rien ! La réalité de la prévention des risques est avant tout économique : le coût global ou individuel de l’aléa, savoir où l’on va construire dans soixante-dix ans, tout ceci doit être évoqué aujourd’hui.

AQC met à la disposition des acteurs des documents qui proposent des méthodes pour empêcher les détériorations suite aux inondations. Elle travaille aussi sur le tassement différentiel des argiles. Elle essaie de communiquer directement avec le grand public, car on est dans un système où les personnes ne se retrouvent que grâce à une position claire de l’Etat qui assure la protection du citoyen.

Il faut aussi insister sur le travail collectif, seul permettant une vue globale du sujet. Ainsi AQC note que, suite à un événement, les réactions spontanées d’aménagement d’un bâtiment ne se préoccupent pas du fait qu’un événement plus grave puisse se produire. Avec les cyclones et les séismes, il y a un besoin de partage de l’expertise scientifique pour faire prendre conscience et redonner confiance. Cela ne peut se faire sans moyens financiers.

DISCOURS DE CLÔTURE : CONCLUSIONS GÉNÉRALES

Lire les discours de clôture

Daniel Marcovitch, Co-président de la Commission Mixte Inondation (CMI)

Nous avons vu que les acteurs sont très nombreux, entre les services de l’Etat, les services déconcentrés, les élus à différents niveaux que ce soit les collectivités locales, les départements, les régions… Plus évidemment tous les acteurs professionnels qui sont concernés. Comme cela ressort de tous les débat, aujourd’hui il y a un problème de conscience du risque, de culture du risque, mais aussi un problème de sensibilisation de tous ces acteurs si on veut qu’à un moment ils se réunissent pour évoquer ces sujets. Je rappelle que le 13 octobre est la journée nationale des Nations unies sur les risques. Il pourrait être décidé que ce jour-là, dans toutes les écoles de France, de faire une évocation de ce que sont les risques en les adaptant aux problèmes locaux. Peut-être lorsqu’il y a eu des catastrophes à certains endroits, que ce jour-là, il y ait une petite cérémonie de rappel sur les lieux de la catastrophe, qui sensibiliserait en permanence et régulièrement les gens. Ensuite, il faut également penser aux médias. Il peut être rappeler dans les informations ou les réseaux sociaux que cette journée est la journée du risque et qu’il ne faut pas oublier que ces risques existent, et qu’ils existent d’autant plus que nous sommes dans une période de changement climatique et qu’ils vont obligatoirement s’aggraver et se mélanger. Une fois que les gens seront sensibilisés, ils trouveront naturel de travailler ensemble pour s’adapter à ces risques, prévenir bien sûr, mais aussi s’adapter à leur existence de vivre avec, voir ensuite comment revenir à un état habituel.

Je pense réellement qu’on n’a pas besoin de créer des organismes spécialisés. On a peut-être besoin de quelque chose d’un peu différent de ce qui a été fait jusqu’à présent et auquel je suis très attaché qui est la notion de bassin de risque. Les risques sont rarement uniques : débordement de rivières, inondations venues de submersion marine, ou sécheresse dans un autre endroit… et avec le changement climatique des choses peuvent alterner sur les mêmes zones. Cette notion de bassin de risque où les élus sont confrontés à des choses totalement différentes mais dans lesquels on doit prendre en compte les uns et les autres, me semble nécessaire. Cela ne veut pas dire créer une structure, mais cela voudrait dire que le gens de cette zone auront peut-être intérêt à parler ensemble de leurs problèmes particuliers. Et puis on a besoin aussi d’aider les élus locaux lorsque cela arrive dans des zones où il n’y a pas obligatoirement tous les services techniques nécessaires. Il y a des associations, je pense à l’AFPCN, il y a des structures comme le CEPRI, comme l’ANEB, qui sont là pour aider les collectivités à trouver des solutions et monter des programmes.

La notion fondamentale est la solidarité et le partage, le partage de l’argent, des compétences et de la culture. Mais aussi un autre partage, comme cela a été dit dans mon atelier, où des collectivités mettent à disposition des agents pendant un certain temps pour aider la collectivité d’à côté à se remettre à niveau., et c’est une forme de plateforme spontanée qui s’est créé dans une zone dans les Hautes Alpes pour arriver à s’aider. Tout ceci me semble important, et se réalisera à la condition que l’Etat laisse un peu d’argent dans toutes les structures qui s’occupent de mettre en place ces travaux.

Marie-France Beaufils – Coprésidente de la Commission Mixte Inondation (CMI), Maire de Saint-Pierre-des-Corps

Je voudrais partir de ce que j’ai pu entendre et de ce qui me semble ressortir des échanges que nous avons eu sur cette journée et demie. Je crois que ce qui est au cœur de la réflexion de tout le monde ici c’est l’aménagement de nos territoires et l’avenir de ces territoires et de leurs populations, j’intègre là habitants et acteurs économiques qui sont des éléments importants. Il me semble que la question qui nous est posée à tous et à toutes c’est un peu ce que vient de dire Daniel Marcovitch, c’est-à-dire qu’aujourd’hui il nous faut dans notre réflexion d’aménagement intégrer tous les risques naturels. Il y a le risque d’inondation, mais il y a aussi le risque d’avalanche en montagne, le risque de ruissèlement qui donne des inondations catastrophiques et est un autre aspect dans ce domaine, il y a aussi les tremblements terre qui existent sur une partie des territoires. Je n’en ajouterai pas plus, je crois que vous les connaissez tous. Il y a une formule qui a été bien rappelée tout à l’heure par le directeur du Cerema. C’est la notion de vivre avec le risque. En Indre et Loire, dans la partie qui concerne la Loire on dit vivre avec le fleuve, qui a été un thème souvent utilisé. Vivre avec le risque c’est faire en sorte que la population connaisse le risque et apprenne que le risque zéro n’existe pas. Il ne faut donc pas toujours rechercher des outils qui vont protéger complètement quel que soit l’événement. Cela n’est pas à la dimension à la fois de la vie des gens concernés et des capacités financières qu’on peut avoir les uns et les autres sur le territoire.

Je ne m’attarderai pas sur la meilleure connaissance et la meilleure appropriation du risque. J’insiste quand même sur la nécessité de vulgariser cette connaissance du risque beaucoup plus largement. Je vais me saisir de ce qui a été dit par le maire de Romorantin et par l’architecte Eric Daniel Lacombe. Les élus siègent pendant six ans et ont ensuite un mandat renouvelé ou pas. Il faut continuellement éclairer sur ce point l’ensemble des équipes municipales.  L’intercommunalité gère sans doute un certain nombre d’aspects de l’aménagement avec le Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI) qui va entrer en action à partir de 2020. Mais, pour une bonne partie des territoires, c’est le maire qui est encore en responsabilité direct des questions du risque quand il survient sur le territoire. Cette question de l’appropriation est donc importante.

Je crois aussi qu’il faut repenser l’aménagement avec tous, c’était un peu le thème de ce que vous débattiez tout à l’heure, et tout cela veut dire les entreprises, les agriculteurs, l’ensemble des services publics (l’exemple donné hier d’un hôpital où les salles d’opération sont dans la partie inondable, n’est certainement pas la meilleure réponse) et puis bien sûr l’ensemble des habitants. Intégrer dans tous les projets cette connaissance pour une meilleure résilience me semble être essentielle. L’exemple de Romorantin éclaire l’idée qu’on ne peut pas simplement penser vivre avec le risque en regardant les constructions neuves. Il faut absolument travailler sur le renouvellement urbain. C’est un des points essentiels de ce que l’on a à faire dans les mois et années à venir et à engager dès maintenant. Si on ne traite pas le renouvellement urbain, on risque de se retrouver dans le cas de la crue qu’a vécu Romorantin : dans le nouveau quartier, les habitants ont pu avoir une véritable résilience, par contre, ceux qui étaient dans l’habitat ancien se sont retrouvés dans l’eau. Il va falloir mobiliser tous les acteurs, particulièrement les gens chargés d’aménagement et ceux chargés de la formation des architectes. Je prends cet exemple car on a des politiques sur la transition énergétique, l’amélioration de l’habitat, etc. qui doivent aussi intégrer en même temps le risque ? La plupart du temps, on travaille en silo, on est côte à côte. Sauf qu’on pourrait s’associer : au moment où on se dit on va réhabiliter un parc de logements par rapport à son efficacité énergétique, on devrait en même temps intégrer cette question du risque auquel il est soumis et qui permette à la fois de mutualiser les investissements et de réaliser une véritable résilience. J’ai pris le risque d’inondation mais on pourrait prendre le risque d’avalanche, d’ouragan… Je pense qu’il faut vraiment travailler ensemble sur ces éléments-là.

Ce matin, j’étais à l’atelier sur l’utilisation des solutions dites fondées sur la nature. Il me semble qu’il y a quelque chose là aussi à utiliser peut-être plus largement, avec toutes les limites qui ont été données ce matin, c’est-à-dire la nécessité d’avoir une analyse véritablement de leur efficacité, mais je crois que là on a de vrais outils qui peuvent venir. C’est la richesse que j’ai trouvé dans l’ensemble de ces deux journées.

Christian Kert – Président du conseil et d’orientation pour la prévention des risques naturels majeurs (COPRNM)

Sans triomphalisme excessif, je pense qu’on peut dire que ces assises sont un vrai succès. On le doit à chacune et chacun de vous : par votre présence, votre participation et vos contributions. On le doit aussi à la ville de Montpellier, à son maire qui nous accueille ici. On le doit aux élus nombreux à ces assises qui ont participé à nos travaux. On le doit également à un certain nombre de partenaires, avec peut-être un petit coup de loupe sur le monde de l’assurance, et sur la Caisse Centrale de Réassurance, partenaire affirmé de ces assises. Puis on le doit à toutes celles et ceux qui ont accepté d’animer les groupes et ateliers de travail. J’ajouterai qu’on le doit également à l’équipe de la DGPR qui porte depuis quelques mois ce projet, secondé par le partenaire privilégié qu’est l’AFPCN.

Je pense qu’il n’y a pas de hasard à se retrouver aujourd’hui à Montpellier. C’est une ville qui a connu des difficultés naturelles importantes. Il faut se souvenir qu’au 14ème siècle il y a eu des épidémies, la peste noire, il restait 20% de la population après le passage de l’épidémie. Puis il y a eu des accidents climatiques très importants, un bouleversement du climat. Cela générait des peurs de l’univers. Il faut se souvenir que l’étang de Thau étant tellement gelé qu’on le traversait complètement à pieds durant tout cet hiver 1384. Les risques climatiques parlent au cœur de cette ville. Ce qui est intéressant dans l’histoire de la ville, c’est que deux siècles après avoir été vraiment dévastée, cette ville est devenue la deuxième ville de France après Paris par son importance, donc on renait toujours de ses cendres, c’est peut-être une des leçons qu’il faut que nous retenions.

Est-ce que ces assises étaient utiles ? Je crois qu’on peut dire que oui. Est-ce qu’elles étaient nécessaires ? Oui, j’ajouterai qu’elles étaient indispensables. Ce rendez-vous de tous les deux ans nous permet de constater que les techniques, de 2 ans en 2 ans, évoluent, que les mentalités se transforment, que les responsables passent. Les histoires que nous nous racontons tous les deux ans nous permettent sans doute de faire un peu mieux vivre, ou plus, un monde intéressant. Je pense que la présence du ministre François de Rugy était pour nous une reconnaissance et un encouragement et je crois qu’on eut le remercier d’avoir consacrer un peu de temps à nos travaux.

Ces rencontres elles ont pour but de relancer nos ambitions et je crois qu’on peut dire qu’elles ont parfaitement rempli leur rôle. Est-ce que lorsque nous allons rejoindre nos territoires respectifs nous allons quitter Montpellier avec quantité de certitudes ? Je ne le pense pas. Je crois que les ateliers ont montré que nous avions encore quelques doutes. Mais ne vous inquiétez pas, car dans ce monde un peu étrange, seuls les sots sont sûrs d’eux-mêmes, et ce sont les gens censés qui ont des doutes. Donc, premier enseignement, nous sommes aujourd’hui entre gens sensés, ce qui est déjà une bonne preuve de la qualité de nos travaux. Second enseignement, nous avons en quelques sorte collectivement décrété qu’après avoir semé quelques doutes, il serait temps de semer des certitudes. Et je voudrais dire à toute l’équipe de la DGPR que grâce à toutes les informations que nous avons échangées et emmagasinées, nous sommes prêts à divulguer quelques certitudes.

Il n’y a pas que les informations, il y a aussi cette culture du risque qui est en train d’irriguer les territoires. C’est assez nouveau et c’est très important parce que si on a mis en évidence à ces assises les notions de territoire et de résilience, c’est que nous avons bien compris l’importance de ces notions-là.

L’intérêt de ces assises est que nous retrouvons ici élus, fonctionnaires, opérationnels… des gens qui souvent dans la quotidienneté se croisent mais se connaissent peu. Ici c’est d’ailleurs quelque part l’Agora. Pour nous tous, c’est important. Est-ce que c’est suffisant. Non, surement pas. Mais c’est déjà un acte important.

Ces certitudes, nous en avons, elles évoluent. Par exemple, on sait que les catastrophes se rapprochent face aux problèmes climatiques, et dans une société qui est terriblement tournée vers l’image, l’immédiateté, l’émotionnel, il y a le sentiment que parfois il faut une catastrophe pour ramener aux réalités du présent. Ces dernières ne nous ont jamais quittés lors de ces assises. Elles sont nées un peu de la sagesse de cette ville. On en est imprégnées.  Souvenez-vous que ce fut ici l’une des premières universités d’Europe, il y a 730 ans. A été étudiant ici il y a cinq siècles Michel de Notre Dame, mieux connu sous le nom de Naustradamus, qui était un aventurier des catastrophes extraordinaires. Cela se passait déjà à Montpellier. On est tous inspiré par nos territoires. C’est ça qui est important.

Montpellier 2019 restera comme l’année de la modernité de la prévention. C’est ça que les unes, les uns et les autres vous êtes venus dire, quelque en soit la forme. Modernité dans les responsabilités des territoires. Dans un atelier quelqu’un a dit « apprenons à prendre notre destin en main », un autre a dit « Faites-nous vivre une utopie refondatrice ». Ce sens de la responsabilité c’est une idée un peu neuve et nous la partageons. Et puis elle nous permet de tordre le cou à une idée très ancienne selon laquelle à chaque catastrophe il faudrait un bouc émissaire. Non, pas de bouc émissaire. Nous avons compris, nous avons dit, que la responsabilité est collective. Nous sommes une communauté de destin ouverte aux idées et ouverte aux territoires. Modernité avec la mutation qu’envisage le partenaire privilégié de ces assises, l’AFPCN, qui tente à devenir une plateforme nationale visant à faciliter la mise en œuvre des politiques publiques. Modernité encore avec la refondation prévue du COPRNM : aux prochaines assises, c’est un COPRNM rajeuni qui se présentera à vous.

Et puis, je ne veux pas passer sous silence le fait qu’on a vécu hier un moment lorsque Stéphane Pellet, le grand assureur, est venu dire qu’il fallait vire chaque année, un dimanche, jour du Seigneur, dédié à la prévention. J’ai noté que Laure Tourjansky a soudainement dit que ce serait le 13 octobre. Elle n’a pas vérifié mais le 13 octobre, c’est le jour de la Saint Edouard le Confesseur. Choisir le prénom du Premier ministre pour tenir les assises de la prévention, j’ai trouvé que c’était seule la providence qui pourrait inspirer une telle initiative. Ce fut un moment fort et sympathique et je crois peut-être qu’il faudra peut-être que vous le reteniez

Dans un atelier, j’ai entendu avec beaucoup de sérieux l’un de nous dire « le pire des risques c’est de perdre le sens du risque ». Nous n’avons pas perdu le sens du risque tout au long de cette journée et demie. Nous ne le perdons pas. Il nous hante parfois. Nous savons que le risque peut resurgir à chaque instant. Je me permets de dire en votre nom que la tâche est plus belle lorsque le risque est plus grand. Notre tâche est belle, on l’a mesurée au cours de cette journée. Notre tâche est belle parce qu’elle est collective, parce qu’elle nous rassemble ici. Toutes ces actions de l’acte de prévention nous les vivons au quotidien et nous les faisons vivre à certains acteurs dans les territoires. Montpellier 2019 ce sera cela : une communauté de destin, rajeunie profondément, renouvelée, qui se dit que finalement, l’espérance c’est un risque à venir et que nous avons souhaité aujourd’hui le vivre ensemble. Merci de votre attention.

SÉANCE POSTERS SCIENTIFIQUES

Bilan général

L’appel à contributions pour les posters scientifiques confirme un certain succès en termes « d’attractivité », même si un peu moins de posters ont été soumis qu’en 2016 : 91 résumés ont été soumis en 2019, à comparer à 114 en 2016, 53 en 2013 et 58 en 2011. 79 posters ont finalement été exposés (respectivement 76, 37 et 38 l’avaient été lors des éditions de 2016, 2013 et 2011).

Rappel : Les posters ont été sélectionnés au terme d’un appel à contributions (soumission d’abstracts) lancé le 4 décembre. Après évaluation, la décision du conseil scientifique a été notifiée début février aux auteurs, avec consigne de remettre les posters sélectionnés avant le 1er mars.

Origine des contributions

Comme l’illustre la figure ci-dessous, la représentation des institutions d’origine des auteurs des résumés et des posters est relativement variée. Sur le graphique ci-dessous sont représentés les nombres de résumés soumis et de posters exposés par institution, en ne retenant que l’institution du premier auteur (sachant que plus des deux tiers des abstracts proposés rassemblaient des co-auteurs de plusieurs institutions).

En considérant l’origine de l’ensemble des auteurs et co-auteurs, ce sont plus de 80 institutions qui sont représentées.

Thématiques

La figure ci-dessous représente la distribution des résumés soumis par grande thématique (en nombre de  résumés par thématique sachant que certains résumés pouvaient aborder plusieurs thématiques).

On voit que même si le thème des inondations reste logiquement bien représenté, suivi de près par les risques littoraux, les autres phénomènes n’en sont pas négligés pour autant (séismes, mouvements de terrain, avalanches, chutes de blocs, crues torrentielles, feux de forêts…). Diverses natures d’enjeux ont également été abordés : infrastructures, économie, assurance, patrimoine… Des développements méthodologiques de diverses natures étaient proposés par plusieurs abstracts : observation et mesure, évaluation du risque, ACB, modélisation…

Enfin, des thématiques plus transversales ont également fait l’objet d’assez nombreuses présentations, sur des thèmes aussi importants pour la prévention des risques naturels que la gestion du risque, la participation, l’information préventive, la vulnérabilité, la résilience et l’adaptation, culture et mémoire du risque, etc…

Consulter les posters scientifiques

Les posters sont disponibles en ligne : Posters ANRN 2019

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